vendredi 30 septembre 2016

LES NOYÉS DE SEPTEMBRE






CHANSON POUR

 LES NOYÉS DE

 SEPTEMBRE












12 septembre 1953  - Douze Oleronnais de St. Georges

d’Oléron s’en vont, de nuit, à la pêche à la senne. Surpris

par la marée montante, onze vont périr noyés

« -Un seul a survécu, me dit mon amie. C’était un jeune

abbé Je l’ai vu revenir comme un cheval fou » …







Chant 1


Fou
Fou le cheval noir
Battant l’air des deux pieds
Fou le cheval noir

Fou le cheval noir
Les naseaux ensanglantés
Ses yeux sont verts
Du vert des feux-follets
           












L’océan est noir
Écume noire aux grèves d’ardoise dure
Le cheval court sur le sable noir
Et le vent s’est étouffé

Qu’attends-tu
Qu’attends-tu
Le cheval court vers le village
Qu’attends-tu dans la nuit noire

C’est le cheval du malheur
Qu’attends-tu dans la nuit noire
L’entends-tu
L’entends-tu

                               










Chant 2


Treize sont partis
Compagnons
Treize qui chantaient
Le huit septembre dans le soir tombé

La marée reflue
Le huit septembre dans le soir
Notre Dame de la Nativité
Et le vent qui chantait

Huit septembre à minuit
La marée remonte
Qu’attends-tu sous la lampe
Dans ce silence de malheur

Qu’attends-tu sous la lampe
Qu’attends-tu
Treize sont partis
Douze à minuit entreront dans la nuit

Cloche du clocher
Combien de coups faudra-t-il sonner
Saint Michel lavera sa chemise
Avec du bleu de lessive












Chant 3


Quand l’océan se retire
Sans à-coups et sans bruit
Quand le vent se tait
Et quand la mer est lisse
La mer ne laisse sur le sable
Que des torrents infimes
Branchus comme des arbres
Sans effort l’eau retourne à la mer
Quand l’océan se retire
Sans aucun bruit
Nuit sans lune
Belle nuit
Nuit tiède
Nuit pleine
Caresse
Et l’envie d’un baiser























Chant 4

O mon amour !
Mon amour, mon amour
Amour de mes yeux
Amour de mes papilles
De mes mains
Amour de mes oreilles
Amour de ma peau
Amour de mes cuisses
Amour de mon ventre
Amour
Amour
Amour de mes instants
Que rythment l’horloge
Les battements de mon cœur
Tic tac
Tic tac
Tic tac
Les mouvements de la mer
Et que faire maintenant
Que faire de mes yeux
Que faire de mes papilles
Que faire de mes mains
De mes oreilles
Que faire de ma peau
De mes cuisses
Que faire de mon ventre
Que faire de l’horloge
Des battements de mon cœur
Des mouvements de la mer
Que faire de la houle
Des marées
Hautes
basses
hautes et puis basses
Que faire du sable
Que faire de l’eau salée
Que faire du souvenir
Souvenir mouillé
Inerte
froid
O mon amour
Mon amour
Mon amour
Que faire de la vie












Chant 5


Huit septembre à minuit
La marée remonte 
Qu’attends-tu sous la lampe
Dans ce silence de malheur

Qu’attends-tu sous la lampe
Qu’attends-tu
Treize sont partis
Douze à minuit
Entreront dans la nuit

Fou
Fou le cheval noir
Battant l’air des deux pieds
Fou le cheval noir

L’océan est aveugle et sourd

Fou le cheval noir
Les naseaux ensanglantés
Ses yeux sont verts
Du vert des feux-follets
Treize sont partis
Compagnons
Treize qui chantaient
le huit septembre dans le soir tombé

                               













Chant 6


Douceur
O douceur
Tiédeur
Tiédeur des chairs humides
Pas même un frisson
Les feux qui s’éteignent
Étoiles phares lanternes et falots
Rouges verts ou blancs
Fixes ou mouvants
Clignotants
Scintillants
Lénifiante douceur de la mer en gésine
L’air qui s’endort
Cœur qui bat
Cœur
Cœur
Cœur
Le cœur d’un bateau tout près
Ou bien très loin
Tacata tacata tacata
Continu
Régulier
Tacata tacata tacata
Cœur cœur cœur désorienté
Cœur
Tac tac tacata tac
Tac
Mon cœur affolé
Soudain dans le brouillard épais
Mon cœur
Mon corps
Mes yeux
Et mon âme qui ne sait où aller

Huit septembre à minuit marée montante
Treize sont partis
Un seul reviendra














Chant 7


Fou le cheval
Les naseaux ensanglantés
Ses yeux sont verts
Du vert des feux-follets


Entends-tu
Entends-tu
Crissant sur le pavé
Les roues cerclées d’acier


Cloche du clocher
Combien de coups faut-il sonner
Saint Michel lavera sa chemise
Avec du bleu de lessive






jeudi 29 septembre 2016

GARDER LA LAMPE ALLUMÉE ....





GARDER   

     LA LAMPE           

           ALLUMÉE …

















Chant 1


Il y a des bouées rouges
Blanches et vertes
Il y a des mouettes
L’eau est calme dans le port
Les pavillons s’agitent
Les mâtures doucement
Se balancent
Les façades sont blanches
Les volets sont verts
Il y a un pin
Presque noir
Odeurs de varech
mais aussi de pralines
Il y a des marchands
De chapeaux
De lunettes
De maillots
Des marchands de barbe-à-papa
De beignets

Au carénage un chalutier
Comme un gros sabot
Incongru sur son ber






Chant 2




Les grosses vagues éclatent
Au musoir obstiné
L’une après l’autre
En gerbes de lumière

Embrassons-nous mon amie
Nous irons lancer
A l’océan
Une couronne
Pour les péris en mer






Chant 3





C’est le quinze août
Noces du soleil et de la mer
Fanfares
Glaces en cornets
Le surplis du Curé
La cravate de Monsieur le Maire
Il y a des filets sur le quai
Allongés
Il y a un cerf-volant
Qui monte et qui descend
Un carrousel
De chevaux de bois
Qui tourne lentement
Au son
De l’accordéon





Chant 4




Il y a cinq ans
Peut-être
Peut-être six
Ou bien dix ans déjà
Peut-être plus






C’était le quinze août
Les fêtes de la mer
C’était hier assurément
Assurément c’est toujours aujourd’hui





Chant 5






Il y a un phare
A tête rouge
Deux pêcheurs à la ligne
Des coques d’acier
Des coques de bois
Dodelinant

Embrassons-nous mon amie
Nous irons lancer à l’océan
Une couronne
pour les péris en mer










Chant 6





Chapelle des marins
Croix de bois
Croix
Croix
Combien étions-nous
Sur le pont
Quand le bateau chavira ?
Croix
Croix
Croix de bois






Chant 7




Entendez-vous
Entendez l’accordéon
Entendez-vous pleurer
Entendez pleurer l’accordéon





Chant 8



                                   




Un goéland
Lentement
Sur un cercle
Toujours le même
Les ailes immobiles


Une âme ...
Toi l’oiseau ?

L’éternité

La vie est un désir
Quand le désir n’est plus
La vie s’en va ...