jeudi 30 avril 2015

CONCLUSION PROVISOIRE



EN GUISE DE CONCLUSION PROVISOIRE .....



















EN GUISE DE CONCLUSION PROVISOIRE






…   MAIS Y A-T-IL UNE CONCLUSION À UNE VIE ? – MÊME LES MORTS SONT VIVANTS  !






J’aurais pu, j’aurais dû, si j’avais voulu être complet, parler plus encore du Maroc et de l’Algérie, mais je le ferai peut-être ailleurs, un jour …

J’aurais pu parler plus du Congo, mais je n’en ai guère vu que Brazzaville et son fleuve, en une période « animée » … Évidemment, j’aurais pu dire les Russes qui demeuraient dans le même immeuble que moi, leurs chants puissants, tard dans la nuit, les rangées de bouteilles de vodka vides, dans l’escalier et devant les portes, au petit matin. J’aurais pu dire les Chinois qui se déplaçaient à pied, toujours trois par trois (Il fallait bien qu’il en eut deux pour témoigner de ce que faisait le troisième ! J’aurais pu dire les jeunes congolais qui arrêtaient nos voitures, le soir, quand nous allions dîner chez des amis : Ils se terraient dans le fossé et pointaient leurs kalachnikovs sur notre nombril en nous réclamant « vos papiers ! », je commençais toujours par écarter le canon de la mitraillette, puis je tendais des papiers, que le milicien lisait parfois à l’envers. Je pourrais dire les deux mitraillettes pointées sur ma poitrine pendant que j’assurais mon émission hebdomadaire au micro de Radio Brazzaville ! Je pourrais parler des deux sentinelles, gardiens de notre immeuble : Ils montaient la garde toute la nuit au pied des escaliers, armés en tout et pour tout … Chacun d’une lance ! Je devrais dire les camions qui passaient tout au long des avenues pour « ramasser » les mendiants et les « suspects », chaque fois qu’un visiteur de haut rang arrivait  dans la capitale : Les « ramassés », on les « mettait à l’abri » pour qu’ils ne puissent être vus. Je devrais dire la chasse à l’homme qui aboutit à abattre un certain Diawara, opposant au régime en place, et l’exposition de son corps  dans le stade de foot ball.
Je devrais dire les administrations au sein desquelles j’étais censé travailler et dont les locaux restaient désespérément vides à longueur de journée, chacun ayant mieux à faire que d’y occuper son siège … Mais tout cela ne m’amènerait qu’à justifier ma décision de quitter le Congo au plus vite : En échange, on me proposa un poste intéressant à Madagascar … Joie ! … Mais c’était au moment, juste, où un coup d’état faisait tomber le Président Tsiranana : Je ne partis pas à Madagascar, c’est le grand regret de ma vie ! Je fus nommé à Vientiane, capitale du Laos, où l’on m’assura qu’il y avait un lycée français dans lequel je pourrais scolariser mes enfants … Las, au moment de mon arrivée là-bas, la langue française disparaissait des établissements laotiens ! Il me fallut scolariser mes enfants à la maison !

J’aurais pu parler de la Suisse, peut-être, et de ses merveilles du côté d’Interlaken ? Mais mes excursions là bas sont tellement anciennes ! Cela ne fait rien, j’ai beaucoup aimé la Suisse, ses montagnes et ses prairies, ses lacs et ses torrents …

J’aurais pu, j’aurais dû parler du Japon, mais à dire le vrai, je ne suis allé qu’à Tokyo, la capitale, invité par l’Université de Tokyo qui célébrait le cent cinquantième anniversaire des relations diplomatiques entre la France et le Japon et organisait une grande exposition dont mon arrière grand père était l’un des héros pour avoir été l’un des botanistes majeurs de ce pays, au temps où les Européens posaient pour la première fois le pied dans le pays … J’ai aimé Tokyo, ses foules des piétons affairés, courant sans cesse, toujours bien habillés, courtois … J’ai bien apprécié la courtoisie des Japonais et des Japonaises, et j’ai bien aimé leurs jardins, leurs parcs, leurs toriis et leurs temples. Je n’ai pas détesté, peut-être à cause de leurs jardins … Je n’ai pas détesté leurs immeubles « gratte-ciel ». J’ai bien aimé la spiritualité qui les imprègne,  teintée de respect et de mysticisme … J’ai beaucoup moins apprécié leurs « sushis » de poisson cru, mais il faut y avoir goûté.

Je voudrais retourner au Japon et visiter les capitales déchues, parcourir les campagnes, prendre le bain traditionnel dans les « ryokan » et dormir dans les auberges du cru. On ne croise plus guère de Geishas, mais on y trouve, peut-être, un genre de sérénité …

Je reviendrai au Japon !













MES ESCALES :




Il n’est point vrai que tous les aéroports du monde se ressemblent, même s’il y a des analogies !  Mes escales ? En vrac :

Paris Orly, Paris Roissy, Toulouse Blagnac, Bordeaux Mérignac, Marseille Marignane, Clermont-Ferrand, La Rochelle, Grenoble …

Nouméa, Port-Vila, Suva, Papeete, Los Angeles, San Francisco, Montréal, New York, Chicago, Londres Gatwick, Londres Heathrow, Oslo, HawaÏ, Dubaï, Dharan, Djibouti, Victoria des Seychelles, St. Denis de la Réunion, Séville, Alger, Santiago du Chili, Puerto Montt, Punta Arenas, Athènes, Tel-Aviv,Téhéran, Singapour, Tokyo, Francfort, Rome, Bangkok, Abou Dhabi, l’Île de Pâques, karachi, Douala, Rangiroa, Mangareva, Hao, Mururoa, Aniwa,, Anatom, Tanna, Huahine, Bora-Bora, Maupiti, Makemo,  St. Denis de la Réunion ………..  J’en oublie, très certainement et je ne sais vers quelles escales encore je partirai peut-être, avant, un jour, que ne finisse ma course … Vaine ? 



mercredi 29 avril 2015

DES TRACES SUR LA MER ...






TRACES ...

                           
                   LA PIERRE DE LAVE





                                                       LE VOLCAN YASOUR - ÎLE DE TANNA - VANUATU












L’ÎLOT  MATTHEW



Bob en rit encore : -« C’est la meilleure affaire de ma vie ! ».
Bob est Australien. Il tient boutique dans l’île de Tanna, au Vanuatu alors appelé « Les Nouvelles-Hébrides ». Il a acheté, de moitié avec un compère français un îlot du pacifique portant nom Matthew ( prononcer Matiou, comme il se doit !), un îlot tout entier, certes tout petit, certes très isolé … On ne voit pas très bien ce que l’on pourrait bien en faire … Mais c’était la meilleure affaire de sa vie parce que depuis, ce volcan ayant explosé, la superficie de l’îlot avait tout simplement doublé !

Au pied de ce volcan, on a scellé une plaque sur un rocher, plaque de cuivre, gravée. De temps en temps, un navire français se détourne vers ces parages pour confirmer le titre de possession national. Sans doute sonne-t-on du clairon, puis le rocher retourne à ses silences qu’interrompent épisodiquement les secousses telluriques et les grondements du Diable … Les oiseaux de mer en fréquentent les franges et les falaises. De rares arbrisseaux accrochent, leurs racines, tels des bonzaïs japonais , dans quelques anfractuosités.



















Île de Tanna (Vanuatu)




Le volcan Yassour est le nombril du monde
Comme il se doit
De son cratère sont sorties
Toute matière et toute vie

Renâclements rugissements
Vomissements nuages noirs nuages gris
Des gloires de fusées dans la nuit
De temps à autre tremblements

Plaine de sable noir
Bombes chaudes encore
Le lac Siwi d’un vert léger
Ou jaune soufre

Fumerolles sources bouillantes
Un malheureux pandanus accroche ses griffes à la pente
Tout ici est sacré
Angoissante mesure de l’homme

L’autre nom de ce volcan est celui de Dieu
On ne le prononce pas.












 YASOUR, OU YAWHE CE VOLCAN POSSÈDE PLUSIEURS NOMS ...





L’îlot Clipperton, à l’autre bout du même océan, est un mince anneau de corail inhabité la plupart du temps. Il n’a été occupé que très épisodiquement par quelques solitaires un peu étranges vivant de noix de coco et de poissons grillés. Quelques savants personnages l’ont fréquenté également pendant de courtes périodes pour y étudier la faune, la flore, les courants marins ou la reproduction des coraux. Ils ont quitté les lieux dès que leur barbe fût devenue trop longue. On n’y entend que les vagues et le cri assez lamentable des oiseaux à l’occasion. Pendant longtemps cet atoll fut disputé, on ne sait trop pourquoi, entre le Mexique et la France. En mille neuf cent trente et un il fut, on ne sait trop pourquoi, attribué à la France, par arbitrage … Du Roi d’Italie !

Sur Clipperton aussi, on a scellé une plaque. Je crois bien qu’elle est également de cuivre. Là aussi, sans doute, à l’occasion du passage de quelque navire dépêché exprès, le clairon sonne, effrayant les fous et les sternes … Clipperton est administré … Par Tahiti !











L’histoire nous apprend ce que valent ces plaques gravées, ces monuments … Autant en arrache le temps ! Il semble que plus le titre de possession est contestable, plus impérative la volonté de l’attester. À Tahiti, on en trouve partout, des plaques gravées ! Histoire de faire ressortir les liens « indéfectibles » toujours, que l’on a voulu nouer et que l’on a voulu serrer le plus possible … Le temps les dénouera sans doute un jour ou l’autre, là comme ailleurs.




























Rien que sur le quai de Papeete, on trouve un monument à la gloire de la France-Libre, on rencontre ensuite une plaque reproduisant le texte de la citation à l’ordre de l’armée française des «Poilus Tahitiens », puis une autre plaque encore, évoquant la citation des Combattants tahitiens de la seconde guerre mondiale. J’allais oublier le buste de Monsieur de Bougainville, trônant face à la Poste entre deux canons modernes. Entre ces plaques, les Chinois de Tahiti en ont scellé une autre commémorant l’arrivée de leurs premiers compatriotes : manière, encore, de rappeler ses droits. Le Monument aux Morts des Établissements Français d’Océanie n’est pas très éloigné de cela, arborant des noms polynésiens.

Dérision ? – Une plaque, scellée sur le mur d’un bistrot, rappelle qu’ « À l’étage au-dessus est mort un célèbre chanteur français », je crois qu’il s’agit de Jo Dassin.






















Poussez jusqu’à la plage de la Pointe Vénus, on a gravé sur d’énormes troncs d’arbres les noms des « grands Navigateurs ». La dernière fois que je suis passé par là, je les ai cherchés en vain : Les a-t-on retirés ou bien ai-je mal cherché ?  Mais peut-être, aussi bien, le flot aura tout emporté au passage d’un cyclone … Ces choses-là arrivent parfois ! Les troncs gravés seraient partis avant que le temps ne les enlève ? … Prophétie ? … Une plaque existait également à la Pointe Vénus, tout près du phare … Elle commémorait l’observation du passage de la planète Vénus par le Capitaine Cook … Elle aussi a disparu … Ou bien elle est revenue depuis ?

Les plaques gravées se fendent ou s’arrachent. Les grands hommes trébuchent et passent. Les drapeaux changent, les sonneries des clairons s’éteignent … C’est le temps qui finit toujours par avoir raison, le temps et l’océan !

mardi 28 avril 2015

QUÉBEC, LA BELLE PROVINCE (5).









                                                    La "pêche blanche" sous la glace ...







Vous avez voulu voir comment se pratique la pèche sur le lac Saint-Jean, l’hiver ? Il fait toujours moins quarante. Vous vous sentez un peu engoncé dans les multiples épaisseurs de vos vêtements. La voiture tous terrains  s’engage sur la glace qui recouvre le lac : Pas de danger … Son épaisseur est de plus de deux mètres, on vous l’a dit  ! pas de cabanes ici, pas de poêles. Des gens creusent un trou dans le hurlement d’une tarière à moteur faisant plus de bruit encore qu’une tronçonneuse. Quand elle s’arrête, le silence reprend ses droits, le grand silence sur l’étendue toute blanche.

Chaque groupe de pêcheurs a creusé une demi-douzaine de trous. Au fond de chacun, on aperçoit l’eau libre, qui ne tarde pas à se recouvrir d’un voile de givre. On jette les lignes dans le trou, sans canne, et on les fixe à de petits bouts de bois dont la détente annoncera les prises. J’ai attendu longtemps. J’ai eu très froid. J’ai tapé du pied et j’ai claqué mes mains l’une contre l’autre … Je n’ai rien pris et mes compagnons non plus, mais … Je vous jure que ce n’est pas l’histoire de la chasse au Dahut ! C’est certain, on prend ainsi du poisson, parfois beaucoup de poisson, même des brochets … Gros comme ça ! … Il ne s’agit pas d’une farce à l’adresse de ces « Maudits Français » !





Retour par la route : Nous sommes allés presque jusqu’à la frontière des Etats-Unis, à Sherbrooke. De Sherbrooke, rien à dire, ou si peu de choses ! La neige tombait, tombait, tombait encore. Nous n’avons rien vu d’autre que les tourbillons de la neige malmenée par le vent. Le mois a passé, la mission se termine. Une anecdote encore, mais elle n’est pas à mon honneur et j’en suis encore un peu confus : Invité au restaurant par  les responsables de la Commission Scolaire, dans un restaurant choisi parmi les meilleurs, J’ôte mon manteau pour m’asseoir à table. Je ne porte pas de veston sous le manteau, seulement un pull … Vous êtes tellement engoncé avec tout ce qui vous recouvre !

- « Je vous demande pardon, Monsieur, me dit le maître d’hôtel, mais le veston est exigé dans la salle. »

Comment faire ? Mes hôtes se regardent, je les regarde … Essais pour parlementer … Le maître d’hôtel est inflexible. Je suis prêt à ressortir, le rouge m’étant monté aux joues, mais le maître d’hôtel m’apporte un veston : Le sien sans doute. Il me prie de l’enfiler. L'homme est  beaucoup moins gros que moi. Je prendrai mon repas en serrant les omoplates dans mon veston étriqué ! … Amis de Sherbrooke, en riez vous encore?








 Une rue de Québec sous la neige





Mais vous me demanderez peut-être ce que j’ai pensé du système scolaire québécois ?

    C’est vrai, j’ai visité beaucoup d’établissements scolaires. La mode était alors aux écoles à « aires ouvertes », et l’on réfléchissait à l’organisation du soutien pour les enfants en difficulté. On avait aussi équipé largement les établissements en récepteurs de télévision. D’autres recherches portaient sur les systèmes d’évaluation. 
Je me souviens que j’ai regagné mon pays en me disant que le système scolaire français, après tout, ne devait pas être si mauvais que cela ! Soit dit en toute amitié et sans esprit de critique : Quand on voyage, on s’aperçoit que tout le monde, dans tous les pays, cherche, cherche … Mais les pesanteurs ! Mais les utopies !






« À QUELQUE TEMPS DE LÀ, LE CALIFE ME FIT MANDER DE NOUVEAU POUR QUE JE LUI PRÉCISE LES CIRCONSTANCES DE MON VOYAGE ET LUI FOURNISSE QUELQUES DÉTAILS SUR LE ROYAUME DE SARANDIB … »
  (Les Contes des Mille et Une nuits)


lundi 27 avril 2015

QUÉBEC, LA BELLE PROVINCE (4)








LE CARNAVAL DE QUÉBEC ...












Je recommande les steaks houses, les grillades sont excellentes et gargantuesques, les darnes de saumon aussi. Mais … si vous voulez un bon café, Il vous faudra, comme moi, arpenter toute la ville … Si, si ! J’ai fini par trouver un bar italien dans lequel on m’a servi un bon expresso ! Mais partout ailleurs, vous aurez droit à un liquide pâle, servi avec une cafetière en pyrex que l’on maintient au chaud tout au long du jour sur une plaque électrique !


L’emblème du Québec, c’est le drapeau à fleurs de lys. Son symbole, ce pourrait être le poêle en fonte : Vous savez, le poêle rond, chauffant au bois. On ne peut plus imaginer à notre époque ce qu’à pu comporter d’héroïsme la vie des premiers Canadiens : Maisons de rondins, fourrures et poêle à bois. Le poêle, c’est la survie de la famille et le trappeur solitaire, même, se déplace avec son poêle d’une cabane à l’autre, quand il va relever ses pièges.

Nous passerons à Trois-Rivières où se louent encore des cabanes plantées sur la glace du lac. Dans la cabane, il y a un poêle, et un trou a été creusé dans la glace épaisse pour que vous puissiez y tremper vos lignes. Traditionnellement, je crois qu’il est prudent d’apporter de quoi boire : Du sec, car il fait bigrement froid ! Il ne me sera pas donné d’aller à la pèche à Trois-Rivières, mais j’aurai l’occasion d’y aller sur le lac Saint-Jean, tout près de Chicoutimi.





            DES TRACES DANS LA NEIGE ...





… Chicoutimi … Inoubliable ! D’abord parce que l’autobus qui vous y conduit traverse des régions aux noms de rêve : Saguenay, Laurentides …
Et puis parce que, si vous avez la curiosité de consulter l’annuaire téléphonique, vous vous apercevrez que la totalité des habitants, en tout et pour tout, arborent trois ou quatre patronymes … Tellement de chez nous ! On les croirait sortis d’un roman paysan : Jolibois, Charlebois, Tremblay … Pourquoi faut-il que j’aie oublié les autres ? Ils chantent en ma mémoire profonde  qui les retrouve parfois.

Autre élément de poésie : Les panneaux de signalisation routière qui signalent le paisible passage de l’orignal, ce grand élan des immensités neigeuses dont on dit qu’il gratte le sol avec ses sabots pour trouver les mousses sous la neige.

- « Oh ! Ne croyez pas qu’il y en a tant que ça ! Je pense, me dit un ami québécois, qu’on a dû planter un poteau chaque fois qu’un orignal a traversé la route ! » … Pour ma part, je n’aurai pas la chance d’en apercevoir, mais cela ne fait rien : J’aurais pu apercevoir un orignal, vous vous rendez compte !



















LA FORÊT SOUS LA NEIGE ...








Les Laurentides ? C’est le massif montagneux que l’on fréquente pour ses stations de sports d’hiver : Je ne les apercevrai même pas : Chutes de neige limitant l’horizon, champs de neige qui recouvrent tout, nivellent tout : Plus de vallons, plus de rivières, plus de lacs, beaucoup de forêts de sapins dont on ne devine que l’orée, tranchée par la route. Mais où donc cultive-t-on le blé ? Où donc pâturent les troupeaux ?  On peut se poser des questions lorsqu’on sait la longueur des hivers. Ce pays, pourtant, produit du blé, produit du lait … Allons, l’homme a su s’adapter partout. Les érables, dont la feuille orne le drapeau canadien et dont les immensités, rousses en automne, embellissent les affiches des compagnies touristiques … Il me faudra revenir en une autre saison !




Lorsque j’arrive à Chicoutimi, la rivière est gelée, bien sûr : Le thermomètre est descendu jusqu’à moins quarante ! Moins vingt à Québec ou à Montréal, je supportais encore allègrement, mon manteau restait ouvert la plupart du temps sur mon pull marin … Mais moins quarante ! Je comprends que des enseignants québécois aient envie d’aller passer un an en Europe pour se réchauffer. Je comprends aussi pourquoi on rencontre tant de Canadiens, l’hiver, aux parages des Antilles ! Moi, je n’existe plus : J’ai relevé le col de mon manteau, j’ai rabatu les oreilles de ma chapska … Il n’y a plus que le bout de mon nez qui dépasse, et il gèlerait vite si je n’y prenais garde : Allons, rentrons le nez aussi ! Mais il faut bien respirer ! Quant aux doigts, heureusement que je porte des gants épais !







AU PETIT MATIN ...





C’est à ce moment-là qu’à proximité, les pompiers chargent dans leur voiture le corps gelé d’un homme qui s’est fait surprendre, probablement en état d’ivresse, parmi les blocs de glace accumulés dans le lit de la rivière … Celui-là est arrivé au bout de son chemin.

Au même instant, et la conjonction des deux scènes produit un effet complètement surréaliste, mes yeux distinguent un restaurant, là, devant moi. Il est installé sous une énorme bulle de verre. Il neige, il gèle, mais les serveuses portent minijupes, vaquant entre les tables et les chaises dans une atmosphère manifestement surchauffée. Le spectacle évoque une sarabande. Il me paraît que ces serveuses en bas résilles ont plus de soixante ans  … Goya, es-tu là ? Pour ma part, je n’ai qu’une hâte : avaler un café bien chaud, même un café réchauffé !







 VIENDRA LE PRINTEMPS ...

dimanche 26 avril 2015

LA BELLE PROVINCE (3)




QUÉBEC





   SAMUEL CHAMPLAIN, NÉ À BROUAGE (CHARENTE MARITIME) - COLONISATEUR 

   DU QUÉBEC .... STATUE DE BRONZE AU COEUR DE LA VILLE DE QUÉBEC.












Mais, place au travail pour lequel je suis venu : Il ne faut guère plus de dix minutes d’entretien avec un professeur québécois pour s’apercevoir que, s’il est volontaire pour partir en France pendant une année, c’est dans l’espoir de fuir la neige, la glace, pendant ce temps-là.

-     « Mon pays, c’est la neige … », chante Gilles Vigneau. Les Québécois sont très attachés à leur « Belle Province », mais … un hiver sans glace et sans neige !
-      

Sortant de la vieille ville de Québec par je ne sais plus quelle porte fortifiée, je tombe sur une esplanade toute plate : On est occupé à l’édification de sculptures monumentales … En glace ! Chaque année, à grands coups de jets d’eau aussitôt solidifiée, puis sculptée, on construit des chars et des palais, on dresse des personnages et des animaux fantastiques … Qui fondront le printemps venu !
Je n’assisterai pas aux journées du carnaval car je dois partir vers d’autres villes. J’en verrai les prémisses : déambulations dans la neige. Un corps gît au beau milieu d’un champ de neige vierge, c’est un homme, jambes écartées, bras aussi. Il a la face dans la neige et … Il ronfle ! Donc il vit … On boit bien à Québec, les jours de carnaval ! La plupart des promeneurs sont équipés d’une canne en matière plastique, creuse … Souvent ils s’arrêtent, dévissent la poignée de leur canne et … s’envoient dans la gorge une large goulée de « caribou ». Le « caribou », c’est un mélange de vin rouge et de gin, en parties égales … Le caribou fait chanter, avant de faire tituber, puis de faire dormir … le nez dans la neige éventuellement !
Mais il ne fait que vingt-cinq degrés centigrades sous zéro ce jour-là : Pour ma part, je supporte encore, manteau ouvert sur mon pull marin.

Les chasse-neige font très bien leur travail : L’autoroute est parfaitement libre, qui nous conduit à Montréal. Nous longerons des champs de neige vierge, nous devinerons les forêts de sapins à leurs lisières : arbres aux branches brisées sous leur charge de neige … Des pendeloques de glace sont suspendues aux rameaux. Le givre brille sur les feuilles.


Immenses étendues, lassantes un peu : La neige recouvre tout, nivelle tout. Les cours d’eau sont pris dans les glaces, elles-mêmes recouvertes de neige,les lacs le sont tout autant, les collines semblent arasées par les accumulations de neige.  L’hiver, les campagnes québécoises sont monotones … Ah ! revenir un jour … Découvrir les herbages et les fleurs, découvrir les eaux vives et les eaux qui dorment ! Dans l’autobus, mais nous y sommes habitués maintenant, on a si chaud que l’on est obligé de tomber la veste.





Montréal … Ville étrange, égrenée au long des routes et des avenues, maisons basses, avec un ou deux étages seulement. Escaliers extérieurs pour accéder directement au premier étage, celui qui échappe à l’enneigement. Puis le centre ville : Une église dont le clocher a dû naguère paraître haut, puisqu’il dépassait les toits des maisons … Maintenant, elle se trouve encastrée en plein milieu d’un océan de gratte-ciel qui la font paraître minuscule. Nobles bâtiments un peu austères : On y conserve le souvenir des religieux et des religieuses qui firent ce pays : Murs de granit, fenêtres hautes à double vitrage. Nous logerons à l’hôtel … Dans le même hôtel que les joueurs d’une équipe de hockey sur glace qui bambocheront toute la nuit … Comment peut-on jouer un match le lendemain d’une semblable nuit ? Pour notre part, nous ne dormirons guère.  Cela m’aura du moins permis d’apprendre qu’il y aura le lendemain un match à ne pas manquer : Les « Canadiens » contre « Moscou » ! Il paraît que le match devrait être splendide et le stade est à deux pas : J’irai découvrir le hockey sur glace au « Forum ».

Je suis entré. J’ai dû rester debout derrière une balustrade qui m’arrivait à la poitrine. J’ai entendu … J’ai entendu crier, j’ai entendu chanter, j’ai entendu taper des mains, j’ai entendu taper des pieds. Il y avait aussi des sifflements, il y avait des hurlements. Tout en bas des gradins, au fond de l’arène, il y avait des géants bardés d’épaulettes, protégés par des cuirasses, des matelas, des casques … Ils étaient armés de crosses qui semblaient être de bois. Ils se battaient pour s’emparer d’un tout petit palet, lequel glissait, courait sur la glace. Le but des manoeuvres paraissait être de coincer l’adversaire, le plus violemment possible, pour l’envoyer valdinguer contre la rambarde. Le choc  produisait alors autant de bruit que l’abattage d’un arbre. On comprenait pourquoi les géants étaient cuirassés, casqués … Le public s’enflammait, se levait, chantait, agitait des drapeaux et des bannières. De temps à autre, l’arbitre devait estimer que le choc n’avait pas été loyal : Pour le punir, il envoyait alors le coupable « en prison » pour quelque temps … Le public sifflait.
L’étonnant, c’est qu’on se laisse prendre à tout cela : J’ai moi-même crié avec le public et j’ai tapé des pieds … Parfois, il arrivait que le palet finisse sa course au fond des buts … Mais était-ce bien là le but de toute cette agitation ?
Les « Canadiens » ont gagné  … Allons, nous aurons encore une nuit mémorable à notre hôtel !


Montréal, c’est aussi le parc du Mont-Royal, deviné, puisque lui aussi  nivelé par la couche de neige, mais on y voit beaucoup d’arbres dénudés et des douzaines de petits écureuils descendent jusqu’à vous pour quêter quelque subsistance.



Les églises sont baroques, lourdement ornées. Où sont-ils, ces fidèles que j’imaginais nombreux dans cette « Belle province » ?  Leurs rangs se sont taris, comme le nombre des enfants a diminué dans les familles. Il n’était pas rare autrefois de trouver des familles avec dix ou quinze enfants, elles n’en comptent maintenant guère plus de deux. Il est peut-être là, le danger le plus évident pour les Canadiens français : Leur société n’est plus en expansion démographique. On le sent bien, d’ailleurs, quand on visite des établissements scolaires : Les effectifs diminuent, le personnel se raidit devant les risques de fermetures de postes. J’avais cru le système scolaire canadien beaucoup plus souple que le nôtre. En fait, la souplesse n’existe que sur le papier. Les syndicats d’enseignants sont devenus très forts :

- «  Je ne peux pas vous recevoir, m’annonce un directeur d’école primaire : Le délégué syndical n’est pas là … »

Ma visite avait pourtant été annoncée par les services du Ministère.

Je traverserai toute la région du lac Saint-Jean, dont les élèves ne vont pas à l’école depuis quarante jours, à cause d’une grève des conducteurs d’autobus scolaires :Il n’y a donc pas que les enseignants qui soient inquiets ! Notons que tous les autobus de ramassage scolaire sont peints en jaune, leur apparence et la fréquence des mouvements de grève qui les paralyse les ont fait surnommer « Le Péril Jaune » !

Autre indice de l’évolution des mœurs québécoises,Tout au long des avenues, le nombre de sex-shops que l’on rencontre est incroyable ! À cette époque, me semble-t-il, il n’y en a pas autant en France.
Diminution du nombre d’enfants dans les familles, désertification des lieux de cultes, floraison des sex-shops … Maria Chapdelaine, où es-tu ?