Je
peux t’affirmer que le brandy, le vinaigre et l’huile n’étanchent pas la soif …
_"Après
avoir débarqué, nous avons tout notre temps pour explorer notre environnement.
C'est un tout petit îlot, très bas, rond et sablonneux. Il émerge de très peu
au-dessus de la mer ... Il est évident que nous n'avons aucune chance d'y
trouver une source ... Au sud-ouest, il y a quelques buissons rabougris. Ils ne
suffisent pas à nous protéger du soleil, mais c'est auprès d'eux que nous
établissons notre camp.
_"
Nous ignorons notre position exacte. Nous savons pourtant que nous nous
trouvons dans la zone des alizés ... Par conséquent, nous avons très peu de
chances d'avoir de la pluie.
La
mousson du sud-ouest, plus au nord, souffle sur les côtes de l'Inde, chargée de
lourdes pluies ... Par contre, nous n'avons aucune préoccupation en ce qui
concerne la nourriture : Nous n'avons qu'à nous baisser pour ramasser les
oiseaux et leurs oeufs !
_"
Ces oiseaux appartiennent tous à la même espèce ... Ce sont des sternes je pense,
car les fous sont plus gros. D'ailleurs, nous trouverons aussi des fous, plus
tard ... Ils perchent sur les arbustes les plus gros de Juan-de-Nova. Nous en
mangerons également.
_"
Le manque d'eau ... C'est là que se trouve le danger le plus pressant ... Il
est à l'origine de nos plus grandes souffrances. La cargaison du Saint Abbs
était constituée en grande partie de spiritueux, de bière et d'huile. Il y
avait aussi des coupons de tissu. C'est grâce à tout cela que nous pouvons
survivre. Depuis que la coque du bateau a commencé à se disloquer, les caisses
de provisions s'échouent les unes après les autres sur le récif de corail et
beaucoup s'y brisent. Leur contenu, boîtes et bouteilles, peut alors être
récupéré dans les creux des rochers ...
Dès
que nous nous en rendons compte, nous commençons à chercher sur le récif, à
marée basse et à transporter sur l'île tout ce qui est mangeable ou buvable...
Nous collectons ainsi une petite quantité de vinaigre, d'huile, de confitures,
d'olives et même quelques précieuses bouteilles de Champagne ! Avec les pots et
les bocaux de confiture, nous constituerons notre batterie de cuisine, dès que
nous aurons réussi à faire du feu. Au début, et pour longtemps encore, nous
n'avons ni feu ni eau. Nous sommes obligés de dévorer tout crus les oiseaux et
leurs oeufs. C'est très peu appétissant car les oiseaux ont un goût de poisson
et de rance ...
_"
Nos journées sont très monotones. Au petit matin nous partons ramasser quelques
oiseaux et des oeufs. Nous les mangeons crus, arrosés d'un liquide quelconque,
choisi parmi ceux dont nous disposons. La distribution se fait en parts égales.
Parfois il s'agit de brandy, parfois de vinaigre, d'huile encore ... Un peu de
champagne les jours de chance ... Les fourrageurs vont jusqu'au récif et
ramassent ce qu'ils trouvent.
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