jeudi 2 mai 2013

EMMANUEL BELLINI ET L'ART POPULAIRE




                                                               
                                                      Emmanuel Bellini - Cannes.







L’ART POPULAIRE


Nous revenons à la chapelle Bellini … Elle est située dans le quartier de la Basse Californie, à Cannes. Elle a servi d‘atelier au peintre Emmanuel Bellini. Déjà, ses œuvres picturales, pleines de charme, soulevaient un problème : Elles n’étaient certes pas des œuvres « académiques » … Étaient-elles des œuvres « naïves » ou des œuvres que l’on pourraient classer dans la catégorie des oeuvres « populaires » ?

Mais que pouvons-nous classer dans la catégorie des œuvres d’art « populaire » ?


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S’agirait-il , tout aussi bien en ce qui concerne la peinture que la sculpture, l’architecture, la musique …


« L’Art populaire est-il l’art des « non-artistes », de ceux qui n’ont pas la création artistique comme occupation professionnelle socialement reconnue ou comme activité spécialisée culturellement identifiée ? »

« Est-il l’art répandu et vulgarisé parce qu’il répond au goût du plus grand nombre ? »

« On pourra conclure en s’interrogeant sur l’art populaire aujourd’hui et sur les différences, s’il en existe, qui le distinguent du « naïf », du « folk », du « néorégional » et du « design » …. »

(citations empruntées à « L’Histoire de l’Art » Larousse éditeur.

                                 

                 Atelier de Bellini - Cannes.


Déjà, les tableaux d’Emmanuel Bellini nous posent ces problèmes d’identité et de terminologie … Mais ce ne sont pas eux qui nous intéressent le plus aujourd’hui : Ce sont les statues en bois sculpté qui sont abondamment présentes dans la chapelle …


Elles ne sont pas les œuvres de Bellini, nous a affirmé sa fille qui nous servait de guide … Mais c’est bien lui qui se les est procurées et qui les a placées là. Elles correspondent bien à ses inclinations d’artiste … « Art Populaire » ?


                                 

                   Atelier de bellini - Cannes.

On peut avoir tendance à définir ainsi un art qui a produit des œuvres dont les techniques et l’apparence ne respectent pas les canons académiques de la beauté.



                                

                      Atelier de Bellini - Cannes.

Art « grossier », dira-t-on … Art fort … expressif, répondra-t-on … Ce sont des oeuvres qui traduisent des rites, des mythes, des croyances fondamentales dans l’époque où elless ont été produites. Ce sont, certes, des œuvres qui sont issues des couches sociales qui ne fréquentent pas beaucoup les académies : Art « pop », art des « graffiti », des « « tags », danses de « capoiera », Chansons « Rap » …

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On pourrait évoquer  les arts du carnaval qui produisent des œuvres fortes … Jusqu’à l’éphémère car elles finissent le plus souvent dans les flammes …Mais ce sont des œuvres dont tout un peuple comprenait les significations.


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Le problème des arts « populaires » est souvent qu’ils recherchent l’expression plutôt que la "perfection" des formes  … Lorsque les mythes disparaissent ou lorsque des croyances nouvelles, des centres d’intérêt nouveaux les remplacent, les œuvres deviennent incompréhensibles : Depuis combien de temps a-t-on commencé à pénétrer les significations des masques et des sculptures africaines et océaniennes ? … Nos églises et nos musées sont remplis de peintures et de sculptures qui deviennent de plus en plus rapidement et de plus en plus complètement incompréhensibles pour nos enfants … Qui n’a pas les clefs de la culture ne peut rien y comprendre !

                                  

                    Atelier de Bellini - Cannes.


Nos jeunes ne baignent plus dans la culture biblique qui a imprégné et produit tant de chef-d’œuvres accrochés à nos cimaises … L’école ne leur enseigne plus guère les mythes des  civilisations grecque et romaine … Il est à craindre que l’éducation artistique de nos enfants ne devienne bien difficile !

Mais revenons à nos statues de bois, dans la chapelle Bellini : Qui sait encore  les noms de ces personnages, qui sont des saints de la chrétienté peut-être, ou peut-être tout simplement des grotesques comme en créaient les bâtisseurs de cathédrales … ?


                                  

                        Église d'Échillais - Charente maritime.


Choisissons un exemple, parmi tant d’autres possibles : Qui sait encore pourquoi, dans les chapelles que l’on rencontre si nombreuses au bord de tous les chemins de France, Saint Roch est toujours représenté soulevant son manteau et l’index montrant sa cuisse ?



Qui sait pourquoi Saint Jacques est toujours représenté avec des coquilles ? Et pourquoi ces coquilles portent-elles le nom du saint ?)

En visitant le Musée des Offices, à Florence, je me demandais si nos enfants pouvaient encore comprendre ce que représente la « découverte du corps d’Holopherne », le « retour de Judith à Bethulia ou encore le superbe et si charmant  "Primavera" ? Et je me demandais si l’on avait le droit de les tenir éloignés de Botticelli ?

Hormis la compréhension du mythe, me direz-vous, il restera l’harmonie, le charme, les couleurs … Oui, mais l’émotion pourra-t-elle être complète et de même qualité que celle que je ressens moi-même ?

                                   

              Musée des offices-Florence : "Primavera" - Botticelli

C’est à tout cela que je pensais lorsque je contemplais les statues de bois de la chapelle Bellini … Auxquelles je n’hésite pas à attribuer le titre d’œuvres d’art  « populaire » ! … Le qualificatif n’a rien de dépréciateur !




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