jeudi 21 mai 2015

LES CHEMINS DE COMPOSTELLE chapitre 1










                                                                     Sur le chemin ...












                                        CHAPITRE 1


              ( Retour ... De Santiago vers Bordeaux)



Seigneur, Seigneur
Nous avons peiné au flanc de l'âpre mont
Seigneur
Le brouillard cachait la vallée
Le roc tout à la fois
Était luisant et sombre
Nous mettions nos pas
Dans les pas des anciens
Nous écoutions sonner les chutes
Nous avons marché dans les névés
Nous avons marché dans les feuilles mortes
Nous n'avons rencontré âme qui vive
Hormis celles des Preux
Du Saint Empire Romain d'Occident
Les vautours planaient
Sur les champs de bataille
Nous courbions l'échine
Seigneur
Nous n'avions nul abri

Aux cailloux du chemin
Seigneur
Nos pieds ont été blessés
Les pluies nous ont lavés
Mais nous n'avions ni craintes ni regrets
Nous allions vers le midi
A tout petits pas
Ne cherchant rien de précis
Espérant seulement
Aller pour le moment
jusqu'à cette borne là devant
Nous avons chu souvent
Dans la boue humide
Où bien d'autres ont roulé
Depuis plus de mille ans

Nous sommes parvenus, Seigneur
Au pied de Ta maison
Aux creux du sombre vallon
Ruisseau clair hautes murailles
Vastes toits d'ardoises noires
C'était bien ta maison ?






                          La fuite en Égypte - Église de Moissac





Seigneur
Tournant à l'ouest nos visages
Nous avons dans la Navarre
Suivi le sentier des mulets
Aux berges du torrent
Écorché nos mains aux épines des branches
Nous avons vu de la truite
L'éclair sous la roche
Nous avons passé le pont
Derrière était dressée la croix de pierre
Seigneur
Savions nous où nous allions ?
Dans la gorge sauvage et sombre
Les violettes poussaient sous les arbres nus
Nous sommes entrés dans la ville
Par le pont des Romains

Haut se dressaient les tours de ton église cathédrale
Nous avons erré sous les voûtes
Seigneur
Nous cherchions Ton visage
Seigneur
L'espace était tout rempli
De princes et de princesses de pierre allongés
Bruit Seigneur
Rumeur des âges
Forteresses remparts
La nuit même était emplie de clameurs
Nous avons repris notre route
Nous Te cherchions
Seigneur

Nous avons cheminé
Sur les très anciens pavés des légions
Filant droit entre les collines et les monts
Sur la cordillère del Perdon
Des moulins d'acier brassaient le temps
Passant sous leurs ailes nous avons
Entendu des cantiques très doux
Dans la plaine les blés avaient germé
Nous sommes allés outre et le chemin
Nous a menés au pied des roches sèches
Des porches romans
Et des cloîtres ombreux
De fières ruines s'élevaient partout
Et la route montait toujours
Nous sommes passés devant des façades ornées
De blasons et d'armoiries
Seigneur
Tes églises étaient emplies de l'argent
De l'or et des pierreries
Apportés par les grands galions d'antan
Pourtant dans la lande
Éclataient les genêts
Nous allions dans le thym
Le romarin la lavande.



Le vent souffle
Seigneur
Fouette la pluie
Nous buvions aux fontaines
Dans le creux de nos mains
Partageant les figues et le pain
Sous de hautes murailles
Au bord des rivières se dressent des tours de garde
Nous avons vu le renard
Après lui courait un lévrier blanc
Seigneur
Combien ta création est belle !
Nous marchâmes ensuite
Aux arrêtes des sèches terrasses
Où se tord l'olivier millénaire

Seigneur
La vigne était noire
Ses ongles griffaient le sol
Le bourgeon seul était plein d'espoir.

Nous sommes passés sur un pont encore
Dessous le fleuve se roule jaune
Allâmes par la rua Mayor
Dans la ville
Qui nous parut grande et belle
Les trottoirs étaient ornés de coquilles d'or
Nous suivîmes ces marques
De Monsieur Saint Jacques
Ciel noir et noirs les murs
Cathédrale fermée de grilles lourdes
Cependant qu'au mur de l'église royale
L'Apôtre caracole et fait flamber l'épée
Seigneur
Nous sommes passés plus avant
Dans le panthéon de Najerra
Nous avons vu encore des rois allongés
Des reines aux joues de marbre blanc
Velours
Mais sarcophages creux
Avec sans doute un peu de poudre dedans
Seigneur Seigneur
Viennent les temps !




                    Cathédrale de Compostelle : L'autel




Au tombeau de Santo Domingo le coq a chanté
Son chant étant de bon augure
Nous a paru plus léger le poids du sac
Moins ardente la brûlure de nos pieds
Seigneur
Nous marchions vers Toi
Traversant le pont sur l'Oja
Nous quittions la Rioja
Seigneur Seigneur
Courbés sous le vent sous la neige et sous la pluie
Peinant dans la boue et dans l'ornière
Nous avons suivi le droit chemin désert
Qui coupait la forêt aux branches noires et nues
Ô Dieu !
Que le chemin nous fut ardu
Dans les monts de Oca !
Nous arrivâmes dans la nuit
À San Juan de Ortega
À la tour la cloche sonnait
Tandis que roulait le tonnerre
Et que les cieux se déchiraient
Seigneur nous avions beaucoup marché !

À Burgos, capitale de la Castille
Nous avons salué sous la voûte gothique
Chimène et le Cid
Les tours veillent sur des trésors
Où étais Tu ?
Nous T'avons cherché, Seigneur
Au long des jardins et des murs
Nous T'avons cherché autour des cloîtres et des hospices
Sous les portes et dans les rues
Nous sommes sortis par un grand pont
Nous avons par un chemin très plat
Très droit
Marché encore vers des châteaux en ruines
Vers des fontaines
Des hospices et des églises
Combien de croix
Combien de bornes ?
La berne était marquée de coquilles
Nous peinions sous le vent
Adios companeros !
Nous avons salué les anciens couchés
Dans les champs du repos


 À SUIVRE



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