LE TOURISME
À Bora-Bora, l’île la plus vantée de Polynésie, l’hôtellerie
commence à souffrir, paraît-il. Pourtant, l’île a des atouts indéniables : Elle
est fréquentée par les Américains, qui l’ont occupée pendant la dernière guerre
puisqu’ils avaient là une base arrière pour leurs opérations dans le Pacifique.
Ils se souviennent de Bora-Bora comme d’un séjour idyllique, faisant contraste
avec les dures batailles des îles occupées par les Japonais ! Ce sont les
Américains qui ont construit ici la première piste pour avions gros-porteurs.
Les avions de ligne ont été tenus de se poser à Bora-Bora pendant de longues
années. On montait ensuite dans un hydravion pour gagner Papeete ...
L’île est à portée de dollars ... Encore que ... en ce moment !
Mais les pavillons de bambou, couverts de feuilles de pandanus ont bien de
l’attrait, d’autant qu’ils sont construits sur pilotis, dans un lagon qui est
une merveille ! La montagne est monobloc : un piton basaltique reconnaissable
entre tous et qui a pour nom Otemanu, ce qui signifie “l’oiseau”. Il fait assez
chaud, pendant toute l’année, pour que les plages soient plus fréquentées que
la montagne. L’île est fleurie. On vous fleurira aussi. On y a tourné des films
célèbres, dont “Hurrican”, qui en a fait l’éloge. On a conservé une partie du
décor de ce film, devenu illustre.
Les Japonais fréquentent beaucoup Bora-Bora ... Faudrait-il dire
”fréquentaient” beaucoup? Des lignes aériennes directes reliant la Polynésie à
l’Empire du Soleil levant assurent le remplissage des hôtels. Les Japonais
viennent beaucoup à Bora-Bora en voyage de noces. Mais qu’en est-il,
aujourd’hui, en ce qui concerne le “remplissage” ? Une loi, adoptée par le
Parlement français a créé des conditions fiscales d’exception pour les
investissements dans les Territoires et les Départements d’Outre-Mer. Cette loi
a surtout favorisé l’extension des flottilles de bateaux, à voiles ou à moteur,
ce qui a créé des emplois, bien sûr ... Encore que ces flottilles soient très
loin d’être utilisées à plein temps ! Les investissements immobiliers ont été
également défiscalisés, ce qui a permis d’accroître les possibilités d’accueil
de l’hôtellerie Polynésienne. Les investisseurs ont tout de suite vu les bonnes
affaires et l’on en connaît auxquels ces investissements ont permis de ne payer
aucun impôt sur le revenu. On commence à s’en préoccuper ... Mais on pourrait
parler, même, d’un afflux d’abus tel que bien des investissements ont été
défiscalisés alors même que leur réalisation est demeurée tout ce qu’il y a de
plus virtuelle.
Est-ce la raison pour laquelle, il y a quelques années, on
pouvait voir à Bora-Bora, tout près du débarcadère, sur une pente de la
colline, dominant les bleus, les violets et les verts du lagon, des traces de
gigantesques travaux demeurés inachevés, abandonnés? De larges saignées dans la
terre rouge, des terrasses comme autant de blessures non cicatrisées, des
bungalows, dont certains presque terminés, les rails d‘un funiculaire pour
éviter aux pensionnaires de l’hôtel d’avoir à gravir les pentes ... Je crois
bien, même que les installations pour motoriser ce funiculaire avaient été
construites ... Tous ces travaux sont restés en plan. C’est là, pourtant, que
devaient s’élever les installations d’un grand hôtel de luxe de la chaîne
Hyatt. En a-t-on fait quelque chose depuis mon départ ? Peut-être, après tout,
cette construction virtuelle n’était-elle qu’une opération de défiscalisation ?
Ou bien peut-être la chaîne hôtelière en question avait-elle senti qu’à force
de construire des hôtels sur la même île, on pouvait arriver à saturation ?
...
D’autant que le prix du voyage s’ajoutant à celui de la pension ! D’un autre
côté, le touriste ayant fait un séjour d’une semaine à Bora-Bora, au-dessus du
“Plus-Beau-Lagon-Du-Monde” s’est fait un superbe souvenir qui restera l’un des
plus beaux de sa vie ! Ô fantasmes !
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