QUÉBEC
C’était il y a longtemps déjà … Un mois de février …. Tout un mois de
février à parcourir le Québec !
« Mon
pays, c’est l’hiver … », chante Gilles Vigneaux.
Vous parlerai-je de Québec ? – Mais Québec, c’est la neige ! La
neige, la neige, encore la neige ! qu’as-tu vu, de Québec ? – La
neige !
Si …
Tu as vu une ville citadelle : Hauts murs à la Vauban, de pierre de
granit, comme à Saint-Malo. N’était la nature de la pierre, tu aurais pu te croire
également à Brouage … Vous connaissez Brouage ? – Dans les marais pleins
de roseaux, pleins d’oiseaux … Perdue vers l’embouchure de la Charente, ville
morte, ville d’autrefois … C’est de Brouage que venait Samuel Champlain, qui
fonda la ville de Québec.
La
citadelle de Québec … Échauguettes et crénaux, portes monumentales
et blasons sculptés. Le tout surgissant du tapis de neige, lequel se boursoufflait
sur le haut des murs … Blanc … Blanc … Aveuglant. Il y avait du soleil et un
petit avion passait, traînant une banderole publicitaire. Au pied des remparts
… C’était le carnaval … Au pied des remparts, des équipes rivalisaient
d’adresse pour construire et façonner des statues de glace : Chars traînés
par des chevaux piaffant, navires d’autrefois, (Et l’on songeait au
Hollandais volant !), Une ourse des banquises accompagnée de ses
petits, Un Indien Huron et sa couronne de plumes … Que sais-je encore ? –
Tout cela étincelant comme cristal !
Mais
Québec, en février, c’est la neige ! – Là, un homme vêtu d’un caban rouge
et d’un pantalon noir … Là, à plat ventre, les bras et les jambes écartés dans
la neige, le visage enfoncé dans la neige … Il a à la main droite une canne en
matière plastique, rouge comme sa veste. La canne est creuse et son bec se dévisse
… Il est dévissé et la canne est vide … Vidée de son liquide : On
appelle ça du « caribou », c’est un mélange de vin et d’alcool de
genièvre : Jambes coupées aussi nettement qu’ un arbre que le bûcheron
abat. Si l’homme n’est pas évacué rapidement et conduit au chaud, il mourra,
gelé. J’ai vu, au lac Saint Jean, près de Chicoutimi, le corps d’un fêtard que
l’on transportait … Il avait dû, lui aussi boire trop de
« caribou » ... Son corps était raide comme une planche.
Québec,
c’est le Château Frontenac, bien sûr. On ne voit que lui et ses toitures
vertes, tel un vaisseau, dominant la falaise, au-dessus du fleuve Saint
Laurent. Mais le Château Frontenac n’est pas un château, c’est un hôtel. Je
connais mal l’histoire de ce château, mais c’est lui que l’on vous montre,
quand on vous présente une photo de Québec. Il est beau. Ses toitures baroques
sont couvertes de neige :
«
Mon pays, c’est l’hiver »
De
lourdes calèches font le tour de la place, devant le château, traînées par de
lourds chevaux aux pâturons poilus. Le dos des chevaux est revêtu d’une épaisse
couverture. Les touristes hilares sont couverts de fourrures et engoncés sous
ce qui peut passer pour des édredons. Tout en bas passe le Saint Laurent,
large, large à n’en plus finir ! Une foule de gens s’accoudent aux
balustres : Sur le fleuve se déroule une course, une course de canots … À
la manière d’autrefois … À l’aviron, sur des canots de bois ... Le fleuve est
garni de banquises. On les aborde de front. On hisse le canot à la force des
bras. On le traîne sur la glace. On le remet à l’eau et on repart. Les canots
sont nombreux et l’humeur est joyeuse !
Nombreuses
églises, nombreux monastères … Monumentaux … Vides ou pleins ? – J’ai été
frappé par le nombre de sex-shops : Il y en avait dans tous les
coins !
Tempêtes
de neige … Vent.
Robert
Charlebois chante :
« Je reviendrai à
Montréal
écouter le vent de la mer
Se briser comme un grand cheval
Sur les remparts blancs de l’hiver … »
Je
suis allé à Montréal : Les routes sont déneigées régulièrement. Nous avons
frôlé les montagnes des Laurentides, mais nous avons vu … La neige ! La
neige ! La neige ! … Plus de rivières, plus de fleuves, plus de
vallées, plus de collines : La neige ! Les forêts de sapins sont couvertes
de neige et les arbres en sont revêtus entièrement. De temps à autre, un
éboulement se produit, une branche casse, un manteau se déchire. Nous avons vu
des gratte-ciel, des gratte-ciel, des gratte-ciel. Et nous avons vu des maisons
pourvues, chacune, d’un escalier extérieur pour permettre l’accès en temps de
neige. Nous n’avons pas vu les écureuils du Mont Réal. Nous n’avons pas vu le
fleuve. Nous n’avons pas vu les jardins, ni les érables qui bordent les
avenues. Nous avons vu les dépanneuses circuler au petit matin : Elles
« regonflent » les batteries des automobiles qui ont passé la nuit
dehors. La plupart des automobiles, d’ailleurs, ne passent pas la nuit
dehors : Leurs garages sont situés à l’étage inférieur des bâtiments :
On sort de chez soi dans sa voiture … Toujours dans sa voiture on rentre sous
l’immeuble où l’on a ses bureaux . Dans les bureaux, on tombe la veste et on
travaille en bras de chemise : L’énergie est si abondante et si peu
onéreuse !
Et je
me souviens d’une église … Ce devait être une grande église. Je me souviens de
son clocher … Un clocher, c’est fait pour être un signal, que l’on doit voir de
loin … Cette église s’élève, coincée entre deux gratte-ciel de cinquante
étages, peut-être … On ne la distingue plus ! Les églises sont à peu près
désertées …. Les foules se pressent au « Forum » pour assister aux
matchs de hockey sur glace : Acclamations, chocs, cris, ambiance
garantie : Ce soir l’équipe des « Canadiens » rencontre celle de
« Moscou ».
Je
reviendrai à Montréal, je reviendrai à Québec : Je veux voir les Plaines
d’Abraham où furent vaincus les Français …. Les « Maudits Français qui
nous ont abandonnés » …. « Tabernacle ! ». Je veux voir les
écureuils et les caribous … Le long des routes, on voit beaucoup de pancartes
signalant aux automobilistes le passage des caribous … À chaque pancarte, le
passage d’un caribou ?
Je
veux revoir le « Chef Gros Louis », de la tribu des Hurons, empanaché
de plumes d’aigle … Je veux revoir le « Chef Gros Louis » qui vend
des souvenirs et de la pacotille, mais aussi d’adorables petits sujets sensés
être issus de l’artisanat des Inuits : Ils sont magnifiques ! Je veux
revoir le « Chef Gros Louis : Il distribuait derrière le comptoir de
sa boutique des prospectus qui étaient autant d’appels à la reconnaissance des
premiers peuples de son pays … Derrière la boutique, il camouflait une
énorme voiture chromée : Une « Buick », je crois bien. J’ai
acheté un pot de confiture de « bluets » … Les bluets sont de grosses
baies de la famille des myrtilles. Ils sont ramassés par les Inuits et par les
Indiens, la saison venue. Et puis, j’ai acheté un petit pot de sirop d’érable,
bien sûr … Un voyage au Québec sans sirop d’érable !
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