CHILI :
ISLA NEGRA
“Mon cœur est un cerf-volant . Quand vous êtes
venue, il s’est envolé.”
C’est la vie !
La maison de Pablo Neruda, à Santiago, s’appelle
« LA CHASCONA »
La jeune femme qui me servait de guide
était
charmante. Ayant vécu à Paris, elle parlait
un
excellent Français... Un sourire !
« Mon cœur est un cerf-volant.
Ah ! Coupez donc cette ficelle qui le retient !
” Bondira-t-il ?
- Il va retomber ! »
“La Chascona”. J’ai appris aujourd’hui que cela
signifie “l’ébouriffée” ... Mathilde, l’ébouriffée.
Aujourd’hui, je suis allé à Isla Negra, qui n’est
Pas une île et qui n’a rien de noir, ni
même de
sombre. “Isla
Negra”, c’est un mot, juste un
mot. Je dois dire tout de suite que je suis
heureux de cette visite. J’aurais conservé
pour
le
restant de mes jours le regret de ne pas être
allé
là-bas ! Ah ! lisez donc le Mémorial de
l’Île Noire !
La Nuit à l’Île Noire
« Une très vieille nuit et un
sel en désordre
cognent contre les murs de ma
maison :
l’ombre est seule et le ciel
est maintenant un battement de
l’océan,
ciel et ombre éclatent avec un
fracas de combat
toute la nuit ils luttent
... »
(Pablo
Neruda)
Cent vingt kilomètres de Santiago. Vous
quittez la
ville, vous traversez la « plaine de Toulouse »,
sèche. Vous traversez les plateaux du « Lauraguais »
( à vrai dire, il y a moins de cailloux,
mais c’est
tout aussi désert ! ).
Collines de la cordillère littorale, usées,
arrondies, sèches. Vous approchez de
l’océan ...
Et vous pouvez imaginer que vous êtes
quelque
part dans les Alpilles. Vous débouchez
enfin sur
un paysage des Landes, très abîmé comme il
y en a
chez nous : clôtures de guingois,
Baraques de marchands de frites, vides à
cette
saison, terrains de camping désolants,
panneaux publicitaires immenses
( Ah ! Coca Cola ! ).
Tout cela attend le peuplement par les
vacanciers. Il y a là toutes les formes de
mauvais goût que l’on peut trouver chez
nous.
Terres pelées, sèches. Une plage ...
De sable noir …
(Vous voyez bien, qu’il y a quelque chose de
noir !),
autour de laquelle sont bâties des maisons
de
bois
qui auraient besoin d’être repeintes. Des
hurluberlus ont badigeonné je ne sais quoi
sur
les rochers, dans la mer, à grands jets de
bombes à peinture. Un “buste” du poète,
informe, a été cimenté sur un rocher.
Comment
a-t-on pu laisser là cette horreur ?
Mais aujourd’hui, j’ai décidé d’être
heureux :
Plus de critiques donc ! Parlons de la
maison de
Pablo Neruda. C’est pour elle que je suis
venu ...
Enfin, pour lui ! Elle a été bâtie par
morceaux, successifs et disparates,
juxtaposés,
un peu comme la “Chascona”,
l’autre maison, de Santiago. On est en
train de
lui ajouter une extension pour y loger la
collection de coquillages, qui n’a pas
trouvé sa
place encore.
-”Mais cette extension avait été
prévue par Neruda.”
Savez-vous que la plupart de ces coquillages ont été
achetés aux “puces” de Clignancourt !
La visite se déroule au galop. Peu de temps pour
s’imprégner de quoi que ce soit. Peu de temps pour
rêver.Vous pourriez croire que, si l’on vous bouscule,
c’est parce que la visite d’un Ministre, à tout le moins,
est annoncée . Mais non! Il paraît que c’est toujours
ainsi.
J’ai bien essayé de protester, de traîner un peu, mais on
m’a regardé soupçonneusement.
On pourrait fort bien se représenter une
maison
de Saint-Trojan-les Bains (Oléron,
Charente Maritime )
Plafonds
de bois, en forme de carène
de bateau renversée. Accumulations
...
de figures de proue, de maquettes de bateaux, de verres
colorés, de bouteilles, d’instruments et d’objets
bizarres.
Il y a une vaste pièce avec une vaste cheminée.
Les murs de cette pièce sont couverts de rocaille brute
Et de lapis-lazuli.
Corne de narval (la licorne de mer)…
Un cheval
naturalisé, debout sur ses quatre jambes. Un vrai
cheval, à robe dorée. Les amis de Pablo ont offert les
harnais et autres accessoires ...
sans se concerter,
ce qui fait que le cheval a trois queues, dont une
noire ! Étriers, selle, mors ...
_”Mais comment entretenir une maison pareille
pour que ne s’accumule pas la poussière ? »
-” Je
pense tout simplement, que Neruda n’était
pas
obnubilé par la poussière ! »
Vue superbe. ( Attention, Michel, tu fais dans les
superlatifs ! )
Vue superbe sur l’Océan Pacifique. Rouleaux
puissants, odeurs de varechs. Pablo et
Matilde
reposent dans le jardin : Mort à la
“Chascona”,
le poète aura attendu pendant vingt ans le
transfert de ses cendres à Isla Negra ...
Je suis heureux d’être venu là.
Mais le poisson-girouette qui sert
d’emblème,
tournant à l’intérieur de l’astrolabe, sur
le toit
de la maison, conserve-t-il le symbole de
l’Esprit ?
Il faut craindre qu’une fois de plus, un
crime
ne soit en train de se commettre ici.
Crime de “marchands de frites” ! Malgré
tout, de
ma visite, me voici revenu un peu plus
riche,
un peu plus capable de comprendre.
Pour le retour, nous avons pris une autre
route.
La “plaine
de Toulouse” était un peu plus verte
cette fois, avec quelques vignes, quelques
champs
de maïs. Il n’en reste pas moins que ces
vastes
étendues sont vides ou brûlées. Les terres
appartiennent à de gros propriétaires,
elles ne
sont pas cultivées parce que les salaires
des
ouvriers agricoles sont bas, très bas. On
se presse
dans les faubourgs de Santiago, et la
campagne
est vide !
Route de l’aéroport. Des kilomètres et des
kilomètres de terrains de foot, déserts à
cette
heure, et pelés, décapés, terre rouge.
Combien de terrains de foot ?
Le chauffeur du taxi qui m’emmène, et qui
baragouine un peu l’Anglais, connaît le nom
de
Michel Platini… Ce que c’est que la
renommée !
Gare centrale : Architecture métallique du
début
du vingtième siècle, importée directement
de
France. Sur les bas-côté, fleurs bleues des
chicorées
sauvages.
Et, tout à coup la merveille de la
floraison d’un
jacaranda !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire