dimanche 14 avril 2019






LE DÉTROIT DE MAGELLAN ET 


LE CANAL 

                        DE BEAGGLE









Paysage couleur de tôle


Tôle galvanisée

Terne

Étain en haut

Plomb en bas

Lévitation

Tapis volant


              




Blessures dans la roche

Blessures profondes

Nécroses

Fin du monde

Tout est gris

Rocs

Murs

Arbres rabougris



                 



Silence

Silence à force d’accoutumance

Mon cœur bat il encore ?

L’horreur

L’horreur d’une beauté grandiose

Faille

Failles et glaciers

Épouvante muette

Tout est gris

Des glaçons dodelinent

Se heurtent

Se saluent,

S’éloignent

Se rapprochent

Muets



               




Pas un être vivant

Pas un marsouin

Pas une baleine

Un phoque

Une otarie

Un poisson qui sauterait

Mais peut-on sauter hors de cette eau ?

Pas une vague

À peine une aile là-bas

Au ras de l’eau

De ce qui doit être de l’eau

Grise

Et qui se replie très vite

Est-il vrai que quelque chose a bougé ?








Roc

Roc

Roc

Roc roc

Basculé

Bousculé

Dressé

Griffé

Fracturé

Déchiré

Vertical


                



Carcasses de bateaux naufragés

Pourries

Rouillées

Rougies

Blanchies

Noircies

Muettes

Mortes


                     




L’ange de la mort planerait-il

Quelque part ?

Même l’ange de la mort n’est pas là et sa voix s’est perdue

Le monde est minéral et métallique

Seul le vide règne ici

Mon âme est immobile

Satan

Une glissade sur ton aile

Pour que se meuve quelque chose ici !



                



Âmes des marins d’autrefois

Où êtes-vous parties ?

Achab

Capitaine Achab

La dunette est vide

Les chants des matelots étaient-ils trompeurs ?

Aucun d’entre vous n’a-t-il abordé à Valparaiso ?

Âmes des Alakaloufs

Avez-vous cessé de gémir ?





J’ai vu le condor des Andes

Mort

Desséché et racorni

Son œil était gris

J’ai vu des monceaux de pierres

De pierres et de coquilles

Vides

J’ai vu une croix de bois

Elle étendait les bras

Des bras sans couleur

Elle disait la mort



                 


Ah ! Que vite

Très vite

On voie venir ici un autobus

De toutes les couleurs

Que vite une trompette sonne ici !

Que vienne ici

Une troupe de clowns de pingouins et de canards

Que sonnent  tambours et  cymbales

Ou bien qu’une cloche sonne !

Au moins qu’une flûte  pleure ici !

Que nos âmes retrouvent vie

Et que nous chantions à nouveau

Les voiles qui claquent

Et les haubans qui vibrent !




Au milieu  du dernier village

De tôles et de bois noircis

On a dressé une pauvre balançoire

Quand le temps le permet

Des enfants s’amusent ici 

Pour l’heure, la balançoire est vide …



 



















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