vendredi 27 juillet 2012

TESTAMENT (FRAGMENT)






... Je vous laisse ...
Ce que j'ai de plus précieux
La cétoine qui dort                    
Au coeur de la rose


Je vous en prie
Donnez-lui l'envol ...

















Les îles dérivent
Chacune de son côté
Je vous offre l'effluve
De la vanille sous le vent
La mer qui scintille
D'un milliard d'écailles

La vanille !








Je vous laisse mes deux bassets anglo-normands
Le premier se nomme Anatole
L'autre Gédéon
Je sais que vous en prendrez soin


Je vous laisse aussi
Mon bonnet de marin













Buvez aux confins de l'île Inutile
En mémoire de moi
Un alcool hors d'âge
Sur un glaçon millénaire
Cul sec
Rejoignez-moi ensuite
Sur une plage de l'île Anonyme











Je vous laisse 
Sur une branche de pin
Une nichée de verdiers
Caudales jaune d'or
Le pic-épeiche à nuque rouge
Grimpant le long d'un fil à plomb
Laissez-les voler

Alouette hausse-col, traquet rieur
La mésange lulu ou sa cousine à moustaches noires
Le bruant fou, le bruant zizi !
La fauvette à lunettes, le pouillot à grands sourcils
Fauvette grisette, fauvette masquée
Le merle bleu, le rossignol philomèle
... Ah ! Le rossignol philomèle !






Je laisse à qui le rêvera
Mon jardin tout entier
Et des noms d'oiseaux par milliers
Ne cherchez pas à les voir
Ils sont beaucoup plus beaux ainsi !

... Je vous donne le vent et la vague
Les ruisseaux, les torrents
L'averse, l'orage
La mer et la glace
Mais n'allez surtout pas couper
les fleurs de mon jardin !
                     ...



... Lorsque je reviendrai
Car je reviendrai ...
Je ferai sur la place de la ville
Tourner un carrousel à deux étages
Aux couleurs de Blanche-Neige
Matin, après-midi
Le soir et toute la nuit ...


Tournez manège !
Au son de l'orgue de Barbarie
Pour les petits enfants


Une seconde vie tout entière
Pour faire monter, descendre les chevaux
Virer les toupies
Rouler les autos


           Attrapez la queue du Mickey !










Je voudrais
matin après-midi
le soir et la nuit tout entière
Entendre chanter des gamins
Qui ne vieilliraient jamais !


              Cela pourrait durer
             Toute une éternité !




                         (Michel Savatier : Testament/ fragment - inédit)

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