Dans le Figaro Madame de cette semaine, sous la signature de Dalila
Kerchouche, nous trouvons, réparti sur quatre pages un entretien avec Madame
Aurélie Phillipetti, actuelle Ministre de la Culture et Madame Marie
Despléchin, écrivaine et présidente du comité de consultation sur l’Éducation
Artistique.
Madame la
Ministre est une agrégée de lettres classiques et Madame Marie Despléchin est
essentiellement un auteur de livres pour enfants. Je dois dire que je soupçonne
à priori la plupart des agrégés de n’être que rarement descendus au niveau de
l’École Primaire : Ils sont très souvent très intelligents et pleins de
bonnes idées, mais ils n’ont que rarement le sens modeste et pratique.
Madame
Despléchin a conduit des expériences en milieu scolaire, mais elle n’est pas de
façon évidente qualifiée pour parler de pédagogie et certains de ses propos
laissent songeur : « En écriture, un bon élève qui respecte les
consignes se révèle vite plat. Comme il veut bien faire, il se fond dans le
moule au détriment de son ressenti. Au contraire un chahuteur du fond de la
classe qui n’éprouve pas ce désir
d’adhésion, qui a un vécu tumultueux, des aspérités, qui est traversé de
sentiments ambigus peut rendre un texte formidable … »
Disons
tout de suite qu’après plus de quarante ans passés dans des fonctions
d’enseignant puis d’inspection, je crois que sais de quoi je parle, même si nul
n’est jamais porteur de La Vérité.
*
Je ne
ferai que quelques remarques, en vrac, comme elles me viennent à l’esprit et
vous voudrez bien m’excuser si, parfois et pour me faire comprendre, je me
montre péremptoire, voire caricatural.
Tout d’abord, j’applaudis tous ceux qui se penchent sur les problèmes de
l’école et sur son devenir. J’applaudis tous ceux qui se penchent sur les
difficultés des enfants et l’inadaptation de l’École au temps présent et, sans
doute, son inadaptation encore plus probable aux temps qui appartiennent à un
futur proche : Les sociétés, les techniques, les rapports humains, les
concepts … Tout cela évolue, se brise et transforme tellement vite que l’on est
bien obligé d’admettre, avec Marie Despléchin que nous ne saurions prétendre
savoir ce qui va servir plus tard à nos enfants.
Ma
réflexion, nourrie de mon expérience, m’entraînera à la fois en deçà et au-delà
de ces considérations : Et d’abord, de quoi parle-t-on quand on parle
d’art ? -
« La
liste classique des arts, telle que
proposée au xixe siècle
par Hegel dans Esthétique ou philosophie de l'art,
continue pour certains de servir de référence.
Elle indique, sans se vouloir pourtant exhaustive, que les principaux arts sont
au nombre de cinq : architecture,
sculpture,
peinture,
musique,
poésie.
Par combinaison ou par prolongement, on parvient à développer indéfiniment
cette liste en y ajoutant, par exemple, la danse, le cinéma (souvent nommé
« septième art »), la bande dessinée, l'opéra,
la photographie,
etc. » ( wikipedia)
Ensuite il nous faut poser la question : De quoi
parle-t-on quand on parle d’École ? – Je ne veux point évoquer ici les
différents échelons de l’école française : École Maternelle – École
Primaire – Collège – Lycée, etc … Là n’est point mon intention : Je connais mieux les Écoles
maternelles, les Écoles Primaires et les Collèges, c’est donc dans ces niveaux
que je choisirai mes propos.
En fait, je n’ai que très
rarement, sinon jamais passé la porte d’une École, appartînt-elle au
secteur du Privé tout autant qu’à celui du Public !
Parler d’École supposerait
une unité d’objectifs, de moyens, de méthodes et une unité des enseignants. Pour être regroupés sous un même vocable il faudrait que ces divers éléments soient eux mêmes unis. Ce
que j’ai vu, ce sont des classes, animées chacune par un enseignant aux niveaux
maternelles et primaires … Mais je dis bien des classes : Demandez donc à un enseignant ce que fait son
collègue, dans la classe voisine – Vous verrez le résultat : Il ignore, la
plupart du temps les thèmes sur lesquels on travaille, les objectifs que l’on
se propose d’atteindre, les méthodes utilisées pour cela. Chaque enseignant
travaille dans son coin et ignore même ce à quoi l’on occupe ses anciens élèves
dans la poursuite de leur cursus. Au collège, les choses sont encore accentuées
dans le même sens par le nombre et la spécialisation des professeurs auxquels
chaque enfant est confronté. Et comme le Directeur de l'École ou le Principal du Collège n'ont aucun pouvoir pédagogique .... Si l’on ajoute à cela la dissociation fréquente
des familles, la perte des repères, due peut-être à des délocalisations
familiales fréquentes, à des modifications de plus en plus fréquentes des
activités professionnelles des parents, à des mouvements de société
imprévisibles et perturbants, aux
incertitudes que la modernité a
introduites en matière d’avenir, il nous faut bien conclure que la moindre des
choses, ce serait de restituer une Unité qui s’est perdue et de donner
par là un sens à la vie.
En
ce sens, je souscris à votre opinion, Madame la Ministre, Madame Desplanchin …
Ce que peuvent attendre de nous nos enfants, c’est qu’on leur offre un, ou des
projets : Ils cesseront peut-être alors de se réfugier dans une musique
effrénée qui leur abîme les oreilles et les SMS qu’ils échangeront seront
peut-être plus consistants. L’ennui, c’est que, chaque fois que l’on change de
Ministre, on change d’idée et d’orientation, souvent en fonction de la propre
formation et des goûts propres au Ministre ou au gouvernement dans son
ensemble : Le Ministre est-il un ancien sportif, il proposera de centrer
les activités scolaires sur le sport, est-il de formation ou son goût le
porte-t-il vers les arts, il y trouvera l’occasion de formuler des projets
pédagogiques !
Quoi
qu’il en soit, il faudrait bien considérer qu’un enfant n’est pas mathématicien
pendant une heure, puis l’heure suivante géographe et la troisième heure vous
voudriez qu’il devienne exclusivement écrivain ou artiste ?
S’il vous plaît, Mesdames, une autre conception de l’École ! Une
École dans laquelle on s’engagerait collectivement dans un projet tendant à une
réalisation pluridisciplinaire … Une réalisation « artistique »,
soit, mais en tout cas une réalisation pluridisciplinaire, concertée et dans
laquelle les enfants se sentiront concernés . Là où je ne puis être d’accord
avec vous, Madame Desplanchin, c’est lorsque vous dites « On pourrait,
par exemple, regrouper les heures de musique et d’Arts plastiques sur un seul
mois plutôt que disséminées dans l’année … » … Eh quoi, Madame ? … Un enfant serait artiste pendant un mois,
puis le mois suivant, il serait grammairien ou scientifique ! On peut
trouver aisément dans un projet à thématique artistique l’occasion et même la
nécessité de lire, de compter, de mesurer, de parler, de chercher, de comparer
et de perfectionner les instruments et les moyens
… Je crois que cela demande que
l’on repense l’École et que l’on décloisonne les activités et les équipes. À
quoi j’ajouterai la nécessité d’un suivi de chaque enfant par une sorte de
tutorat exercé par un autre enseignant que celui qui lui est habituel, mais
tutorat exercé par un enseignant chargé de cours comme ses confrères - tutorat
qui aurait pour objectif de permettre à chaque enfant de se construire dans une
unité qui lui manque et de l’aider à donner un sens à ce qu’il fait tout autant
que de découvrir une unité dans ce qui se présente à lui de façon
dispersée : Peut-être quelques enseignants supplémentaires dans l’école,
peut-être des enseignants moins chargés en horaires d’enseignement, mais
assumant plus d’heures de service dans l’établissement, au bénéfice de ce
tutorat que j’appelle de mes vœux et qui permettrait également la
communication avec les parents! J’insiste sur la nécessité de « Servir »
dans l ‘établissement sur un
nombre d’heures plus important.
Je
vais publier ces quelques « pensées » sur mon blog … C’est le seul
moyen pour moi d’exposer ces idées, puisque les « commissions » sont
désignées par le gouvernement, qui a lui-même ses propres objectifs. Merci à
ceux qui m’auront lu jusqu’au bout et "advienne que pourra" !
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