LA GUADELOUPE
LA GUADELOUPE
Orange rouge jaune violet Bougainvillées tôles rouillées toits de guingois Jaillissement des palmiers au soleil-Roi Indigo mer vibrations d’argent souvenirs de galions et d’or de voiles et de claquements de tonnerre
Trois tours de béton étals de fruits pays sous la halle de fer tissus fleuris au kilomètre enroulés déroulés et l’air sent la bagasse douceâtre
Les moulins ont perdu leurs ailes depuis longtemps pour autant qu’ils en aient eues un jour! Les moulins à sucre de pierres taillées coiffés de feuillages et les cases de bois en troupes montant bariolées aux flancs des mornes En bas s’étirent les Grands Fonds des Matignon
Entre les deux Mamelles montagnes sur l’immense écran bleu lavande toute la forêt-mère de feuilles de branches de palmes de fleurs
Troncs et l’arbre a pour nom gommier Bois côtelette Bois bander
Que sais-je encore ? Piliers jaillis de l’humide et pourvus de racines apparentes tortueuses millions de serpents immobiles entremêlés anacondas et pythons cordes nœuds et rubans
Les arbres les plus grands sont pourvus de renforts comme murs de cathédrales Grimace tout à coup tout un peuple de gargouilles
épiphytes aux branches suspendues fougères aux longues feuilles luisantes Sous-bois de gouttes d’eau et de bâtons Inquiétantes muqueuses fleurs et bâtons épineux l’argile rouge colle à la semelle Odeur d’humus et de mort
Oreilles d’éléphants et autres feuilles géantes lucioles toute la nuit et l’orchestre doux de cascades de grillons de graviers d’oiseaux inconnus aux trois notes de l’accord parfait
GROS-KA ! quelque part là-bas battu au rythme du pouls de la vie partout ces yeux ces cris à qui sont-ils ? D’où venues ces flammes dans les cannes courant à Noël passé annonçant la coupe et la course des chiens chassant les mangoustes et les Titi-racoon sous les feuilles longues aiguës comme des sabres ?
Un grand homme Maire et Président géant les bras levés les joues luisantes de sueur applaudi par une foule superbe Des fonctionnaires prennent des notes et parlent à voix basse
On dit que le volcan hier s’est encore ébroué Les savants ne sont pas d’accord quant à l’avenir mais la terre a tremblé Sous des centaines de tentes verdâtres militaires on fait l’école et ça sent mauvais la toile chauffée On a beau rouler les bords il fait trop chaud Football pourtant aux terrasses fraîchement écorchées par les bulls jaune-orange et autres engins
Un homme vocifère juché sur un fût de pétrole invectives incantations il s’en prend à la France pas moins" Qui nous a pressurisés"
"Allons-nous longtemps rester des esclaves ?”
Attendant le bon vouloir du volcan de la Soufrière souvenons-nous de la Montagne Pelée mille neuf cent deux Vingt-six mille morts un seul rescapé dans un cul de basse-fosse La mer Morte Sodome et Gomorrhe La Basse-Terre évacuée c’est encore un coup de la Soufrière
Politique d’oppression Les foules sont logées dans les écoles de la Grande-Terre on porte la soupe et le pain et des armoires ont été dressées entre les lits de camp milliers de gens, milliers d’enfants poussant du pied des boîtes de conserve vides ou des ballons Radios gueulant biguines serré-collé
Avez-vous vu mes gosses ? Où sont-ils partis ? Au soleil violences sourdes couvées la nuit Au petit matin éclatent couleurs et formes foisonnantes élancements et odeurs d’alcools de décollage piments et fruits
corail hirsute coupant crabes de terre et de mer langoustes cuirasses de guerre hallebardes poignards surcots de satin ou de brocart médailles plaques ferrets émaux cabochons sable blond coquilles mangroves à palétuviers-pieds-tors héron noir héron blanc et le poisson-qui-grimpe-aux-branches hibiscus rose-porcelaine simple ou double pervenche mille épées mille éclats bougainvillées
Gérard Stricher
Basse-Terre la plus haute bien sûr la plus humide la plus verte Maisons et baraques vides clopin-clopant posées sur quatre pierres de guingois parois ornées ou plaquées de fer-blanc de boîtes à biscuits découpées aplaties clouées Grandes cases à toits multiples balustres jardins bassins fentes des persiennes closes
Jet d’eau des chutes du Carbet dans les bananiers l’allée des palmiers royaux trente mètres de haut et les cyclones !La ville elle-même vide ses forteresses d’un autre âge et son port rues tracées au cordeau et la Préfecture est vide aussi la police assure la sécurité des biens
La Soufrière va-t-elle éclater ?
Mais c’est Pointe-à-Pitre capitale qui oppose son gargouillement et Petit-Bourg Baie-Mahault Sainte Rose et sa fontaine ornée de chérubins peints en vert-épinard on n’a pas encore évacué la Mairie hors de la zone de danger Ailleurs à Vieux-Habitants à Gourberre et Trois-Rivières on a lâché le bétail dans la nature les vaches meuglent les pis trop gonflés
-” N’y va pas m’avait dit la Créole assise sur son mur écroulé du côté de La Rochelle
grande famille de colons ruinés
N’y va pas ma maison à Trois-Rivières est termitée Ma maison aux balustres de bois dans le parc il y a encore les bassins pour faire bouillir la mélasse
C’est trop tard ! Si tu savais autrefois !”
Mais cet homme au chapeau-nimbe couleur de paille bras levés devant le ciel bleu juché sur son fût vide au Morne-Rouge incantations et tout cet or sur la mer
Quel bonheur d’être venu quand même !
Les doigts
Des larges feuilles déployées
Parfums
Aux aisselles de la nuit
Soie
Et la peau de la nuit
Lueurs
Aux ventres des galets
Trajectoires
Des lucioles prenant vie
Pulsations
Flûtes et crécelles
Aux plans successifs de la nuit
Flux
D'un ruisseau haletant
Lourdes gouttes
Froissements
Et l'haleine vaste
De la nuit
Le sentier monte
L'homme dort
Dans les cercles
De ses réverbères électriques
Aboi
Et derrière
L'océan qui respire
Ma main
Sur la hanche de la nuit
Ma joue
Sur le flanc de la nuit ...
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