samedi 15 novembre 2014

LE BOUILLIDOU



LE CANNET DES MAURES
































Là où c’est splendide, c’est quand tu prends ton vélo pour descendre de Lorgues jusqu’au Cannet-des-Maures : Une ivresse beaucoup plus intense qu’à la montée , d’autant que tu as tout ton temps devant toi ! Alors, tu choisis l’autre route, pas celle qui passe par Les Arcs et Vidauban, celle qui passe par le Thoronet. Je l’ai également prise à la montée, mais seulement quand le vent ne soufflait pas. À la descente ... Une gloire !

Chaque fois, je m’arrête au Thoronet. L’abbaye est vide, mais elle est en parfait état. Je pose mon vélo contre le mur et puis ... J’écoute. J’écoute les cigales et les oiseaux. Parfois j’entends glisser dans les herbes une couleuvre de Montpellier. Dans le cloître, j’écoute mon cœur, mon sang. J’écoute mon âme ... Un cloître, c’est bien fait pour ça ? Deux ou trois roses, redevenues sauvages, retournées à l’églantine. Fraîcheur des murs épais, sonorité sous les voûtes, appel d’un faucon tiercelet.










Couchées à même les dalles, au milieu d’une allée nue, gisent les cariatides de Puget. On les a déposées là pour les mettre à l’abri de la guerre. Elles attendent la reconstruction de Toulon.

“Puget, Pierre : Sculpteur français, né à Marseille (1620-1694 ), dit le “petit Larousse”. Il est l’auteur des atlantes de l’hôtel de ville de Toulon”.

Les atlantes ont été sculptés pour porter le poids d’un balcon et le poids du monde.
Je sais que c’est là que j’ai pris le goût d’un certain art, puissant. Mais ils étaient désolants, les atlantes délaissés au Thoronet, seuls occupants, et couchés, d’une abbaye déserte. Pas même un gardien. Je les ai revus depuis. Ils ont repris leur place. À nouveau, ils portent le balcon du bâtiment, qui est devenu le musée naval. Je les ai revus comme de vieilles connaissances. Ils ont retrouvé signification et identité. Au Thoronet ... deux géants allongés ... Ils étaient retournés à la pierre comme les chimères de Ségalen !
Mais, n’eussent-ils pas été là que j’eus aimé le cloître tout de même. J’y avais des moments mystiques et purs. Parfois il me venait des pulsions de vocation ... Qui n’en eut jamais ?
































Je remarque avec curiosité que j’ai toujours aimé fréquenter les temples, mais surtout quand ils sont vides. J’aime les églises romanes. Le plein-cintre ramène à la terre et le bruissement intérieur fait alors entendre sa voix. L’ogive, elle, est un élan, un mouvement.


Après le Thoronet, tu reprends la descente : Elle est rapide. Elle tourne et vire.

Te souviens-tu du jour où une perdrix piétait sur les cailloux du bas-côté, avec tous ses pouillards, gros comme des bouchons de champagne. Pagnol n’avait pas encore divulgué le nom des bartavelles. Le temps de jeter le vélo dans le fossé, d’escalader le talus ... Les petits couraient dans tous les sens pendant que la perdrix faisait front. J’ai pris deux ou trois poussins, bonheur pervers sans doute, mais bonheur ! Le cœur plus gros encore, le sang plus vif !

Mon entourage en aurait-il pris son parti, ou bien ne se serait-on rendu compte de rien? En tout cas, moi, j’ai bien cloisonné mon existence : Je sais comment changer de peau !

Mais ... Le Grand Meaulnes ...




Mieux que le Grand Meaulnes ! Tout aussi rêvé, tout aussi vécu et des émotions qui vibrent encore. Des éveils qui ont créé pour toujours l’étalon de mes joies.

Au pied du Vieux Cannet, sous la colline au village maure, dans un creux caché par les cyprès, il est un château ... Il existe encore, je le sais, je l’ai vu, mais je ne suis jamais retourné jusqu’à sa porte.

Ne jamais retourner vers son rêve ... Mais, c’était un rêve ?









Prenez le train qui va de Cannes à Toulon et regardez bien : Sur la droite, passé Vidauban de quelques kilomètres, on identifie facilement le Vieux- Cannet, ses murs ocres et ses toits qui grimpent les uns sur les autres. Sur la gauche, dans les vignes, on aperçoit les hangars d’une base aérienne. Nous y habitions. C’est maintenant un aérodrome affecté à l’Aviation Légère de l’Armée de Terre.

Lorsque je passe par là, je suis un peu perdu. De mon temps, l’autoroute n’existait pas: Le château se trouve maintenant coupé de la vallée. Mais je me souviens que j’ai vu construire les premiers viaducs . Une réussite ! Un chauffard y écrasa, roulant à pleine vitesse, la moitié d’un troupeau de moutons !










Sur la gauche, le nouveau village du Cannet”: Rien qui attire l’oeil.

-” Mais regarde ! Regarde entre les cyprès ... Là ! Deux tours carrées, des fenêtres ouvertes. Allons, il y a de la vie au château !”


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