dimanche 24 juillet 2016

C'EST LE CHEMIN "MAJUSCULE".....
















                Je n'ai pas rencontré beaucoup de téléphones portables sur Le Chemin ... Pas encore.

_" Prends-en un, me dit-on souvent ... C'est une sécurité ... Imagine ... Marchant seul quelque part ... Tu te fais une entorse, tu fais une chute, tu tombes malade ..."








-Je résiste encore ... Avec un téléphone portable, aurai-je toujours l'indépendance nécessaire pour chanter à pleine voix "Les Filles de La Rochelle" lorsque j'en ai envie, ou bien pour réciter "La Ballade des Pendus" ? ... J'ai récité la "Ballade des Pendus" sur la route d'Orsanco ... Je veux pouvoir me la réciter encore sur les sentiers de Galice ...






Que signifie " se ressourcer" ? _ J'ai lu beaucoup de livres traitant de pèlerinages et parlant du Chemin de Compostelle ... J'ai même lu celui de Paulo Coelho ... Il a eu le succès que l'on sait. Je ne l'ai pas beaucoup aimé : Que vient faire ici cette histoire ésotérique de secte et d'épée ? Je ne prends pas Le Chemin pour me faire Chevalier de l'Ordre du Sépulcre ou de celui des Templiers ! ... Mais si ce livre vous a plu ... Quel droit aurais-je à le critiquer ? _ Est-ce que je n'écris pas "Le Chemin", avec des majuscules, moi-aussi ? ... N'est-ce pas, ainsi, reconnaître le mythe ?
_ C'est "Le Chemin Majuscule" pour nous-autres, occidentaux : Celui qui s'est ouvert aux alentours de l'an mil, celui dont les abords sont semés, depuis mille ans, de chapelles, d'oratoires, d'églises, de sanctuaires, de gîtes, d'hôpitaux pour les pèlerins, de hameaux tout entiers habités par les "donats", ces hôtes consacrés au soin des passants ...





L'oratoire de Soyartz, en haut de sa colline, est propice à la contemplation. Le chemin qui, de là, conduit jusqu'à la chapelle Saint-Nicolas d'Haranbeltz , cachée sous un feuillu de chênes rouges, ramène à la méditation. Chaque pierre de la draille, chaque borne, chaque ornière, chaque gué et chaque pont font revenir en mémoire la foule des pèlerins cheminant depuis un millénaire ... C'est cela aussi, que vous êtes sans aucun doute venu chercher, pèlerin : La file continue des hommes et des femmes allant par monts et par vaux ... On cheminait beaucoup autrefois: Avez-vous oublié les brassiers qui allaient, la faucille à la main, la fourche sur l'épaule, les bergers meneurs de troupeaux, les colporteurs trimballant leurs éventaires, les pénitents, les fantassins, les prophètes ?








Toute l'Europe a marché. Les chemins de Compostelle partent, à vrai dire, d'Amsterdam, aux Pays-Bas, d'Arhus, au Danemark, de Gdansk, en Pologne, de Budapest, en Hongrie, de Zagreb, en Croatie, de Naples, en Italie, de Lisbonne, au Portugal, de Glasgow, de Londres et de Dublin, passant par le Mont-St. Michel, par les ports de la Gironde, par ceux de Galice. C'est au sein de cette cohorte de marcheurs, de pèlerins de toutes nationalités, de tous âges, de toutes statures et conditions que vous allez prendre place, mettant vos pas dans les leurs ... Vous allez les retrouver partout, leurs pas, marqués aux parvis des églises, imprimés aux pentes et aux cols, au long des rivières et le long des champs ... C'est pour cela aussi que vous allez prendre Le Chemin ...







... Vous le prendrez, c'est tout à fait certain ... Pour retrouver vos racines, pour vous ressourcer, pour retrouver votre famille de tous temps et de tous lieux. Vous chercherez aux façades la coquille, la statuette au carrefour, la borne au coin du bois, la marque de peinture laissée là par ceux qui sont passés devant ... Elle vous évitera l'égarement. C'est cela aussi, le cheminement : La recherche de la marque, marque de l'autre, marque dans le temps, marque dans l'espace, marque de l'homme, marque de Dieu.







... Car il en est encore qui marchent pour Dieu ... Est-il un marcheur qui va pour autre chose que pour Dieu, au bout du compte? ... Se "ressourcer", qu'est-ce que cela veut dire ? ... Ce serait , me dit-on, "retrouver ses racines", retourner à "l'essentiel", dépasser les contingences, dépasser les modes, dépasser l'image, les mirages , outrepasser l'instant ... Quelles racines autres que celles qui plongent dans la terre des sentiers et des champs, dans les cailloux des vignobles, les fissures de la roche ? ... Quelles racines autres que celles qui plongent dans les âges ? ... Quelles racines, autres que celles qui se diversifient dans les familles et dans les peuples, dans les nations et dans l'espèce ? ... Quelles racines, autres que celles qui, à rebours, conduisent aux origines, expliquent ce qui paraît absurde, font chanter les désespérés ?









Il n'y a pas ceux qui marchent par esprit sportif, ceux qui le font pour chercher une paix fugitive, d'autres, qui marchent pour s'enfuir, ni encore ceux, qui seraient les seuls vrais pèlerins, les seuls purs : Ceux qui marchent pour trouver Dieu au long des vallées, dans le haut des collines, tout au fond d'eux-mêmes ...






Je suis intimement et fermement persuadé que nous marchons tous pour tout cela, tout à la fois ... Et si nous disions, tout simplement, que le pèlerin marche... pour "être" ... Tout simplement pour être. D'autres trouvent sans doute ailleurs le moyen d'exister ... Constatons que dans ces années de fin de millénaire, il y a de plus en plus de pèlerins sur les sentiers ... Cessons de nous demander pourquoi ils marchent ... Ce n'est que très rarement sans doute parce qu'ils croient vraiment que le sarcophage de pierre de Jacques-le-Majeur, flottant sur les océans, poussé par les vents, porta jusqu'en Galice le corps décapité de l'apôtre ...






_ Et si c'était vrai malgré tout, cette histoire d'apôtre du Christ venu là, jusqu'aux confins de ce qui était alors le monde connu ? A qui ôterez-vous le droit de rêver et de croire ?

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