vendredi 22 février 2019

SEYCHELLES - LA LANGUE





SEYCHELLES - LA QUESTION 

               LINGUISTIQUE






 





_ ( Oh ! Ne raillez pas la langue créole ... Combien les latins ont-ils dû

 railler le Français ! )






Il peut paraître étonnant que la langue française perdure aux îles

 Seychelles. Certes, elle n'est pas parlée dans les rues. Certes, la librairie de

Victoria propose peu de livres qui ne soient écrits en Anglais. Dans les rues

 de Victoria, on parle Créole. Quand on lit, on lit en Anglais. La radio et la

 télévision, cependant, présentent certains programmes en Français. Le

journal unique, ( quotidien et distribué gratuitement ), comprend des

articles rédigés dans les trois langues. 

Certains spéculent et causent, mesurant en permanence l'évolution

prétendue de la place réservée à chacune des trois langues : Jalousement, à

 la ligne près ... à la minute près... 

Le Centre Culturel américain propose des activités en Anglais, le "British

 Council" également. Le Centre Culturel Français parvient encore, d'une

 façon ou d'une autre, à trouver des amateurs pour sa bibliothèque et pour

les spectacles qu'il organise : Il y met du sien et l'on raconte que, pour cela,

 il fait distribuer des billets d'entrée gratuits... Par l'intermédiaire du "Parti

 Seychellois"... Il offrirait même les places d'autobus gratuitement ? 




 



Depuis mille neuf cent quatre vingt un, dans les écoles, l'enseignement

débute en langue créole : Les enfants apprennent à lire dans leur langue

 maternelle, (Ils y gagnent certainement en aisance ... ). Très tôt, on

enseigne l'Anglais puis, dès la cinquième année d'école primaire, la langue

 anglaise devient le vecteur de toutes les disciplines académiques : L'accés

 aux technologies nécessite en effet l'utilisation d'une langue à large

audience, ouvrant la possibilité de consulter des documents en nombre

 suffisant. 

L'enseignement du Français est introduit en quatrième année, mais il

n'obtiendra jamais le statut de langue d'enseignement. 

Après quelques année de fonctionnement, on s'aperçut qu'en fait, l'Anglais

 souffrait de son propre statut : Lorsqu'il prend en charge les autres

 matières, et particulièrement celles qui relèvent des domaines

scientifiques, il n'a pas eu le temps de mettre en place le vocabulaire et la

 structuration indispensables : Les concepts de base ont été installés en

 langue créole ... L'Anglais en souffre, la progression des acquisitions

aussi. 


                                



Le Français, lui, souffre de l'absence complète de statut : Il ne sert à rien :

On apprend à le parler, mais on ne le parle pas. On le comprend, presque

 sans même l'avoir appris, tant le Créole lui est proche. On apprend à le

 lire, mais on le lit si peu ! Quant à l'écrire ! 

De plus, à cause même de sa proximité avec le Créole, il est difficile à

apprendre, étant victime de toutes les contaminations et interférences

 possibles ... Imaginez un enfant qui passe d'une langue créole à graphie

 phonétique et syntaxe simplifiée à une langue française dont chacun

connaît les pièges ... syntaxiques et orthographiques ! Le Français , en fait,

est enseigné parce qu'il est la "langue-mère", d'où est sorti le Créole. 





 






Nous fûmes longs , en France, avant d'évacuer l'enseignement du latin ( ...

 Pour autant que ce soit ce que l'on ait fait de mieux ...) : Dans un

processus psychanalytique, il est bien difficile de "tuer la mère" )... "Tuer le

 père" était plus facile : C'était le colonisateur ... Et puis, disent les

 Seychellois : _" Nous avons conservé le Français pendant les cent

 cinquante années de la colonisation britannique alors que notre pays n'a

été français que pendant quarante ans. Pourquoi ne le conserverions nous

 plus maintenant ? " 



 



_ En fait, les administrateurs britanniques ont fait peu pour imposer leur

 langue : La maîtrise des voies maritimes vers leur empire indien leur

importait plus qu'une anglicisation et plus qu'un peuplement. Les

Seychelles étaient catholiques ... Le Français était, et reste encore la langue

 liturgique principale, ( tout comme l'était en France le Latin, au temps de

 mon enfance...) _ La langue française a perduré grâce à Dieu !

Mais l'état de paix qui pouvait sembler régir l'utilisation des langues a

disparu ... Point tant du fait des Seychellois que de celui des Français et des

 Britanniques ... 

 


Tirant à leur façon les conclusions de faits observés ailleurs, dans leurs

territoires et départements d'outre-mer, les Français se sont aperçus qu'il

pouvait être politiquement utile de développer autour de la Réunion des

 voisinages amicaux ... Une communauté de langues pouvait y être

favorable... 

Lorsqu'on l'étudie, le Créole des Seychelles est plus proche du Français que

 celui des Antilles ... Il n'a pas semblé absurde d'espérer qu'en prenant

appui sur le Créole, on pourrait donner un nouveau développement au

 Français. Certains semblent avoir pronostiqué l'accroissement de l'aire

 francophone aux Seychelles, au détriment de l'aire anglophone. 



 




Le Créole, "langue-fille" pouvait-il engendrer sa "langue-mère" ? Le calcul

 n'est pas absurde : On voit très bien les difficultés de l'Anglais à l'école.

 Les Britanniques et les Seychellois l'ont senti : On a augmenté le nombre

des bourses d'études dans les universités anglophones et on a décidé, de

plus, que les futurs professeurs passeraient deux années à l'université du

 Sussex... Ne parle-t-on pas, même, de former là-bas les futurs professeurs

 ... de Français ! 



 




L'Ambassade, la Mission Culturelle, et le Ministère des Affaires Etrangères

 - français - s'activent ... Et font souvent des impairs ! Les étudiants

Seychellois, boursiers de l'Etat français, sont envoyés à grands frais dans

les universités de la Réunion, ou dans celles de Bordeaux, Paris, Aix - en

Provence, Besançon, Nice, ou ...  « Trifouillis-les Oies » ! Ils ne sont ni

encadrés, ni préparés à ce qu'ils devront découvrir. On a vu, même, une

étudiante partir ... Pour Clermont- Ferrand, je crois, afin d'y poursuivre des

 études de Français : Elle est revenue quelques années plus tard, ayant

bénéficié d'une réorientation ... Nantie d'une maîtrise ... d' Anglais ! 



 




Pour l'heure présente, on réfléchit. Les Français ont peut-être fini par

s'apercevoir que les études conduisant au Diplôme Universitaire d'Etudes

Générales, ( D.E.U.G. ) n'étaient pas adaptées aux Seychellois . Ils vont

 sans doute proposer une formation spécifique ( Pour trois ou quatre

 étudiants par an, à l'Université de la Réunion. ) 

Les Seychellois, eux, méditent : Ils ont été échaudés par les échecs de

plusieurs promotions aux épreuves du D.E.U.G. ... Et puis ils acceptent

 difficilement l'idée d'envoyer leurs étudiants à la Réunion alors que

l'Angleterre leur propose des études en Europe ! D'où l'idée d'envoyer tout

 le monde dans le Sussex ... Si la France n'était pas le principal bailleur de

fonds des Seychelles ! 




 





... Cette année, en attendant, aucun étudiant seychellois n'est parti en

 formation pour devenir professeur de Français. Le gouvernement

 seychellois recrute donc, de bric et de broc, pour enseigner le Français

 dans les écoles, des Guinéens, des Mauriciens, des Algériens ... Et des

 Malgaches qui, dès leur arrivée, font valoir leur double-nationalité pour

bénéficier des allocations dispensées au bénéfice de leur famille ... Par la

 France ! 


 



Cependant, Monsieur l'Ambassadeur de France a bon espoir : Il a fait un

rêve ! ... Sur la montagne, la France finance l'installation d'une antenne

 parabolique qui permettra de capter "Antenne 2" en direct et vingt quatre

heures sur vingt quatre : Victoire de la langue française en perspective ! ...

Peut-être, peut-être ... Suite au prochain numéro ! 












1 commentaire:

  1. La guerre des langues.... Moins meurtrière que les autres guerres, heureusement.

    Mais l'anglais part gagnant, pour le moment. Il est devenu, en l'espace de quelques décennies le langage universel (en attendant peut être son remplacement, rien n'est éternel . La pureté de la langue anglaise doit en souffrir, d'ailleurs : canadiens, australiens, néo-zélandais ont leurs propres mots, expressions, accents, sans parler de l'anglais pratiqué par les indiens et les africains des anciennes colonies britanniques. Ils ont leur créole, eux aussi
    Heureux dimanche, Michel !

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