vendredi 23 janvier 2015

OLÉRON - LE PLUVIER DORÉ



LE PLUVIER DORÉ




































On m’avait dit ... Je ne sais plus qui m’avait dit cela ... On m’avait dit que le pluvier doré passait au printemps. Oh ! Il ne restait pas longtemps, juste le temps de choisir un coin tranquille sur une bosse inculte, souvent derrière une touffe de joncs. Vous savez ces grandes bouillées de joncs bleuâtres à têtes brunes ... Quand il avait trouvé ce qu’il cherchait, il s’installait et la femelle pondait un œuf, un seul œuf, mais un œuf d’or ! - Un couple de pluviers dorés ne pouvait pondre autre chose qu’un œuf d’or, n’est-ce pas ? - Pour qu’il en sorte ... Un petit pluvier doré !








Ah ! Il m’en souvient maintenant, c’était le Père Pataud qui m’avait raconté cela, le Père Pataud qui était forgeron au village de L’île, entre Saint-Georges et La Brée. Sa forge était située près de l’emplacement de l’ancienne chapelle de NOTRE-DAME, il avait, devant la porte, un énorme figuier. Le Père Pataud, c’était quelqu’un ! Il me faisait un peu peur. Je le croyais un peu sorcier. Il tirait la chaînette de son soufflet et les braises rougeoyaient, les étincelles sautaient. Avec une longue pince, il sortait du feu un morceau de métal tout blanc, le posait sur l’enclume et, frappant à lourds coups de marteau, en faisait un espiot’ ou le soc d’une charrue.






Quand il parlait, sans pour cela ralentir le rythme de ses coups, sa moustache remuait, sa moustache jaunie par le tabac. Ses avant-bras étaient herculéens.



- “ Je t’assure, si tu cherches bien, tu finiras par le trouver, le nid du pluvier doré. Et tu trouveras un œuf d’or.”



















La nuit, je ne parvenais pas à m’endormir. La lune glissait un rayon par la fente des volets de ma fenêtre et, doucement, une tache de lumière blafarde marchait sur le couvre-lit. J’entendais le vent. Il soufflait doucement et je croyais ... Oui je croyais entendre les pépiements des pluviers dans les marais tout proches. Je ne savais pas si les sifflements étaient ceux du pluvier doré ou bien, seulement ceux du pluvier argenté. Le pluvier argenté, fi donc ... l’argent, c’est bon pour les fourchettes et les cuillers que l’on met sur la table le dimanche !




Vint un moment, c’était au printemps ... vint un moment où il n’y eût plus de clair de lune. C’est ce qu’on appelle, chez nous, la lune noire. Les pépiements étaient de plus en plus nombreux, tout près.




-”Tiens, me dit le père Pataud, la nuit dernière, je suis allé relever mes bourgnes à anguilles et j’ai vu, oui j’ai vu un pluvier doré. Il est parti dans mes pieds,derrière une touffe de tamarins.”






















C’en fut trop pour moi ! La nuit suivante, je me levai, j’entrouvris les volets, j’écoutai longuement, extasié : Les pépiements des pluviers, on les entendait, nombreux, provenant de toutes les directions, vous savez, des sifflements sur deux notes, l’une longue, l’autre brève. On ne peut pas s’y tromper : le sifflement du pluvier se distingue aisément de celui du courlis cendré.










Dans la maison, rien ne bougeait. Les parents dormaient. Je pris juste le temps de me vêtir et ... Je passai par la fenêtre. J’avais chaussé des espadrilles pour être plus silencieux. Le chien gémit. Ce fut bref et je m’immobilisai un instant. Lorsque, tout aussitôt après, j’ouvris le portail, il ne grinça pas. C’était une chance. Et me voilà parti. Dans les marais, bien sûr ! ...









Ce texte est contenu dans le livre ci-dessus, édité aux éditions "LE CROÎT-VIF .... demandez-le à votre libraire !




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