LE TOUT PREMIER DÉBARQUEMENT AUX ILES
SEYCHELLES
:
JOURNAL DE BORD DU
CAPITAINE
ALEXANDER SHARPEIGH ...
1609.
( traduction du journal de bord
de John Jourdain _
Société Hakluyt. )
19 janvier
1609
Aux environs de neuf heures du matin, nous
aperçumes une terre
haute, qui s'étendait de l'Est au Sud. A
trois heures de l'après-midi,
nous distinguâmes d'autre îles, qui nous
semblèrent être au nombre
de quatre. Au soir, elles apparaissaient du
Nord à l'Est, à quelque
cinq lieues de nous. Nous laissâmes les
voiles fasseyer toute la nuit…
jusqu'à l'approche de l'aube, puis nous
approchâmes de la terre dans
l'espoir d'y trouver de l'eau et des vivres
frais.
A midi, nos observations nous situaient par
4° et 20° de latitude. (1)
20 janvier
Au matin, étant tout près de la terre, nous
laissâmes fasseyer nos
voiles et nous mîmes la yole à la mer pour
aller sonder devant le
navire et chercher un bon mouillage. Ainsi,
nos hommes allèrent
jusqu'à une petite île (2 ) , la plus proche
de nous, se trouvant à deux
lieues environ au Nord de l'île haute ( 3 ).
Ils débarquèrent dans une
belle anse sablonneuse. Nous aurions pu y
mouiller dans de bonnes
conditions, mais, comme nos hommes ne
signalaient pas avoir trouvé
d'eau, nous ne jetâmes pas l'ancre. Le canot
revint donc. Il ramenait
autant de tortues terrestres qu'il pouvait
en contenir. Nous nous
approchâmes donc des autres îles.
Les tortues fournissaient une bonne viande,
aussi bonne que du
boeuf frais, mais après deux ou trois repas,
nos hommes refusèrent
d'en manger à cause de l'apparence si laide
de ces animaux avant la
cuisson. Elles étaient si grosses que huit
d'entre elles remplissaient
la yole.
Avançant parmi les îles, nous trouvâmes dix
à douze brasses à une
lieue de terre. A deux lieues, il y avait de
vingt à trente brasses, avec
un très bon fond. Pour le soir, nous avions
pensé mouiller près d'une
île qui s'étendait Est / Nord _ Est et qui
paraissait pouvoir offrir
beaucoup de fruits et d'eau. Mais la nuit
était proche et, comme nous
avions aperçu des hauts-fonds et des rochers
au long de la côte, ainsi
que
d'autres îles devant nous, nous virâmes de bord et nous restâmes au large,
cap au Nord / Nord _ Est, en attendant le
lendemain et en espérant
que nous trouverions un bon mouillage auprès
des autres îles qui
nous apparaissaient un peu plus loin à l'
Est / Nord _ Est.
Mais sur notre route il y avait une petite
île ( 5 ), à deux lieues
environ du rivage. Nous ne parvenions pas à
la doubler, mais nous
réussimes à passer entre elle et l'île
principale. Nous avions des
fonds de quinze à vingt brasses. Cette
petite île n'était guère plus
qu'un rocher, ou peu s'en faut. Ayant passé
ce rocher nous tirâmes
des bords jusqu'à minuit, puis nous
demeurâmes sous la côte Est de
l'île, les voiles flasques, sous un vent
frais. Nous tirâmes des bords
vers l' Ouest, puis vers le Nord et l' Ouest
/ Nord _ Ouest, pour
demeurer auprès de l'île.
J'avais aperçu une trentaine d'îles petites
et grandes, et les eaux
étaient libres autour d'elles. Nous fîmes
route au Nord par rapport à
elles. La distance entre l'île la plus au
Sud et celle qui se trouvait le
plus au Nord pouvait être d'environ vingt
lieues, et elles étaient très
rapprochées les unes des autres.
(1 ) _ D'après Revett, 4° 48'.
(2 ) _ Ile du Nord.
(3 ) _Ile Silhouette.
(4 ) _ Praslin et ses voisines.
(5 ) _ Mamelles.
21 janvier
Au matin, nous nous sommes préparés pour
nous rendre à terre.
Nous avons envoyé notre yole pour sonder
devant le navire et pour
chercher un endroit favorable au
mouillage.
Aux environs de neuf heures du matin, nous
avons jeté l'ancre par
un fond de quinze brasses, à un demi-mille
de la côte, à peu près.
Mais il y avait là beaucoup de petits
écueils. En conséquence, nous
allâmes plus avant.
Nous trouvâmes alors un fond clair et nous
pûmes avancer aisément.
En plusieurs endroits nous trouvâmes une eau
potable excellente,
mais rien ne venait signaler qu'il y avait
jamais eu là une vie humaine
.
Il y a un excellent passage qui se trouve
entre deux îles situées à
environ un mille et demie l'une de l'autre
et qui s'étendent de
l'Est / Sud _ Est au Sud _ Est et au Nord _
Est. Il y avait trois autres
îles qui se trouvent à trois lieues environ
de l'endroit où nous étions
à l'ancre. Ainsi nous nous trouvions dans
une sorte de bassin entouré de
terres, sauf à l'Est / Nord _ Est et à
l'Est.
Pour permettre l'identification de l'endroit
où nous étions au
mouillage, je dirai qu'il y avait une petite
île ( 3 ) qui se trouvait à
proximité, au Nord du chenal à deux lieues
environ et qu'il y avait un
rocher ( 4 ) entre l'île dans laquelle nous
voulions nous rendre et
celle dont je viens de parler ; le passage
se trouvant au Sud de
celui _ ci . Vers l'Ouest _ Nord _ Ouest se
trouve une île très haute, à environ
dix lieues, qui est celle dont j'ai déjà
parlé ( 5 ). Nous avons jeté
l'ancre. Le passage était à 4° 10' Sud.
22 janvier
Mettant un canot à la mer afin qu'il se
dirige vers l'Est / Nord - Est,
nous
élongeâmes deux filins sur une bonne longueur et nous
mouillâmes l'ancre par treize brasses de
fond, excellent fond.
Nous étions à une portée de pistolet du
rivage, vers lequel nous nous
dirigeâmes comme si nous avions navigué dans
un bassin de vingt à
trente brasses de profondeur.
Nous fîmes alors de l'eau et du bois tout à
loisir, avec beaucoup de
facilité. Nous trouvâmes beaucoup de noix de
coco, mûres et vertes,
de toutes espèces, beaucoup de poissons,
d'oiseaux et de tortues
( Mais nos hommes ne voulaient pas en
manger, alors que nous
aurions pu en tuer autant que nous aurions
voulu. ).
Il y avait beaucoup de raies, et autres
poissons. Auprès des rivières,
il y avait également beaucoup d'alligators (
8 ) . En pêchant des raies,
nos hommes en prirent un. Ils le tirèrent au
sec tout vivant, en lui
passant une corde derrière les ouïes. Sur
l'une de ces îles, à deux
milles de l'endroit où nous nous trouvions,
il y avait de beaux arbres,
tels que je n'en avais encore jamais vus
quant à la hauteur et au
diamètre du tronc. Leur bois est dur . On
peut en trouver beaucoup
qui mesurent de soixante à soixante-dix
pieds de haut, sans une
seule branche, si ce n'est tout en haut. Ils
sont très gros et droits
comme des flêches. L'endroit est excellent
pour les rafraîchissements
et
pour le bois, l'eau, les noix de coco, les oiseaux et les poissons.
Il n'y a aucun danger de quelque sorte que
ce soit, à l'exception des
alligators. C'est à ne pas comprendre que
personne ne soit venu ici
avant nous. ( 9 ).
( Le 1er
février, ils mettaient à la voile ... )
( 1 ) _ Mouillage final, sous Ste. Anne,
près
de la Victoria actuelle.
( 2 ) _ Cerf, Ile-Longue et
Ile-Moyenne.
( 3 ) _ Mamelles.
( 4 ) _ Brisard.
( 5 ) _ Silhouette
( 6 ) _ 4° 35 Sud.
( 7 ° _ coco-de-mer ?
( 8 ) _ Il s'agissait de crocodiles, ( Ils ont
complètement
disparu ! )
( 9 ) _ Ils ont appelé ces îles : " Les
îles
désolées " !
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