mercredi 21 juin 2017

NAUFRAGE DU SAINT ABBS



NAUFRAGE DU SAINT ABBS


                                                 







_"Terre ! " crie quelqu'un ... Juste au moment où
 nous nous réveillons ...

Ce cri est accueilli comme une véritable

bénédiction : L'espoir revient avec le

petit matin !




_" Là ... Nous en sommes sûrs ... Presque sous

le vent ... On distingue, sans erreur possible ...

L'ombre d'une petite île basse. Dans la lumière

encore pâle, elle semble couverte de roseaux ou

de bambous que surmonteraient leurs fleurs,

comme de grands panaches ... Lorsque le soleil

disperse les brumes matinales, on apporte les

longues-vues ... Il apparaît clairement qu'il ne

s'agit ni de roseaux ni de bambous, mais que

d'innombrables vols d'oiseaux de mer planent

 au-dessus de l'île, au ras du sol ...

La lumière devient plus vive. Elle nous découvre

 une seconde île, plus grande et plus haute, sous

 le vent ... Elle est un peu plus éloignée ...







_"Nous avons fait naufrage entre ces deux îles,

sur le récif qui court sans doute de l'une à l'autre

. Nous saurons plus tard que la plus petite est

l'île Bird. La plus grande est l'île Juan-de-Nova.

Nous nous trouvons dans le groupe des îles

Farquhar, situé à deux cents milles au nord-est

de Madagascar. Les rouleaux se fracassent sur

le récif et le submergent complètement à marée

haute. De toute évidence, aucun bateau ne

saurait demeurer intact au-milieu de semblables

 déferlantes. Les vagues énormes, soulevées par

 les vents du sud-est et poussées jusque là en

une course ininterrompue à travers l'Océan-

Indien, sur plus d'un millier de milles, s'écrasent

 sur les écueils qui brisent leur course

triomphante. Celui qui n'a pas assisté à pareil

spectacle peut difficilement imaginer leur

déchaînement. 





















_"Le soleil se lève, le treize juin, sur un véritable

spectacle de désolation : Le navire est naufragé,

démâté, entouré d'épaves ...

_" Le Saint-Abbs possédait trois embarcations :

Une baleinière et deux canots, mais l'un de ces

derniers a été écrasé lors de la chute des mâts et

du gréement. Il ne reste donc plus que la

baleinière et un seul canot. La baleinière, qui se

trouve sous le pont principal, a servi d'abri aux

porcs et aux moutons pendant tout le voyage...

Elle n'est pas en excellent état pour prendre la

mer ... C'est pourtant elle qui représente notre

seul espoir de sauver ceux qui ne savent pas

nager car on ne peut même pas envisager de

lancer un radeau ... Aucun être vivant n'aurait

une chance de tenir sur un radeau : La mer est

tellement démontée !










_" La marée atteindra son niveau le plus bas vers

 midi. Nous tenterons de gagner le récif à cette

heure-là


















 ... Tous nos efforts se concentrent en vue de la

mise à l'eau de la baleinière ... Il faut d'abord la

hisser avec les palans ... La manoeuvre n'est pas

facile ! Vers dix heures trente, pourtant, la

baleinière a été descendue. Elle flotte le long de

la coque du Saint-Abbs. Monsieur Stone,

le Maître d'équipage est à son bord avec deux

matelots ...

_" Il ne faut pas plus de cinq minutes pour

qu'elle soit mise en morceaux ! ...


Le Maître d'équipage, évanoui, est remonté le

long du bord avec les plus grandes difficultés ...

Plus agiles, les deux matelots ont sauté juste à

temps. 





_" Les débris de la baleinière restent suspendus .

.. Pour aujourd'hui, tout espoir de sauvetage est

perdu. Monsieur Stone est très affecté : Il ne sait

 pas nager ! Il désespère et se recroqueville dans

 un coin ... C'est navrant pour nous tous car

Monsieur Stone est très apprécié pour ses

grandes qualités de marin.


Jamais un après-midi n'a été plus triste ! ...

Nous restons assis, contemplant la vague qui

bat le navire condamné et le met en pièces ...

Les oiseaux de mer tournent autour de nous.

Ils crient. On ne perçoit aucune sympathie dans

leurs voix discordantes et je ne suis pas dans un

état qui me permettrait d'admirer la grâce de

leurs évolutions circulaires ... Il est évident qu'ils

 nous observent avec la curiosité la plus intense.

Il n'y a aucun doute là-dessus : Leur va et vient

n'a pour seul but que la contemplation d'un

spectacle inhabituel ... 


















_" Tout a une fin pourtant ... même la journée la

plus triste et la plus longue ! Le soleil finit pas se

 coucher... La nuit tombe.


La situation est désespérée ... Le navire est en

voie de destruction rapide ... Nul ne peut dire à

quel moment, dans combien de temps nous

serons précipités dans l'éternité ... Tout est brisé,

 sur le pont ... A chaque coup de boutoir, suivi la

plupart du temps d'un long frémissement, nous


 voyons arriver notre fin. 

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