lundi 3 avril 2017

AU LONG DE L'ÉTROIT SENTIER ...

AU LONG DE L’ÉTROIT SENTIER 

 



Au long de l’étroit sentier, il t’a bien fallu pousser devant toi les moutons égarés, jusqu’à ce qu’ils trouvent dans la clôture le trou qui leur a permis de rejoindre le troupeau. Va ! La gourde est vide, mais tu finiras bien par trouver de l’eau !










Il y a plus de mille ans, le Diable a construit le pont… L’eau … L’eau et le temps ont creusé les falaises, gorges, gouffres, précipices. Combien de millions d’années a-t-il fallu pour que le fleuve en rut, saison après saison, s’enfonce dans ces cavernes et dans ces grottes ?  Ô cascades claires, ruissellements, bouillonnements, brillances, éclairs, calmes et brusques mouvements ! Dans la fente du roc, l’homme a bâti le sanctuaire … Faut-il y croire ? … Ô, touristes, promeneurs traînant les pieds, montant la ruelle en mangeant des hamburgers ! Sous la voûte très ancienne, des vierges chantent des vêpres solennelles.




 



Les chemins en lacets montent aux falaises. Les caillasses roulent sous les pas ? Ah ! Le lézard vert serti sur la dalle de craie ! Immobile, les yeux d’or, paupières battantes, ocelles bleus sertis de noir … Mon frère le lézard aux flancs haletants … C’est rêver ! Il faut pourtant que tu montes. Ivresse da ns le ciel où moutonnent les collines vertes pressées. Le lac te regarde encore ; Il faut aller plus haut, plus loin, remonter l’espace et le temps. Ici, il reste des tertres de pierres empilées. Il faut aller ailleurs.
Pointe sonore du bâton…




 


Pur. Ah ! Pur ! Où, dans la roche ; où, dans le ciel; où, le pur diamant ? Sur le tranchant des pierres, que l’on nous conduise aux déserts du sel, aux portes des monts de cristal !

Asphodèles, épines, le goût du fer et de l’anthracite à la fois … Pur et seul, et chantonnant tout bas des chansons très simples, des chansons d’innocents. Ah ! Très pur ! Lame claire !




 




Ce sera ensuite pays plus humain et plus civilisé, plus tendre. Il se révèlera sous la pluie. Après l’essor des flèches et des ogives, c’est retour vers le sol par l’arcade romane, vers le cœur de l’homme, retour sur soi. Marche dans tes pensées … Les terres sont peignées, apprêtées, les forêts ne sont plus les mêmes. Contrastes des couleurs… Ors des colzas … Vert frais des semis de maïs ou de blé, glauque des forêts de mélèzes puis ceux, plus légers, des bois de hêtres ou de chênes … Bruns et rouges des labours minutieux … Pour l’instant, la terre est à sa première toilette ? Ô, formes de l’esprit, semblables à ces jardins japonais, où à ces cloîtres d’antan, toujours peignés, toujours ratissés de neuf ! …
Chaque chose à sa place et la place pour l’esprit ! Méditation, promesses de fenaisons très belles, de lourdes moissons, d’abondantes vendanges …








Puis c’est encore une très vieille cité, que domine sa cathédrale, vaste vaisseau dont la proue laboure depuis cinq siècles les mêmes vagues de pierre au flanc de la colline. Cité chargée d’histoire et de houles, garderas-tu la piété ? … En ce dimanche de printemps, un archevêque consacre un prêtre nouveau. Rare cérémonial, par les temps qui vont ! Pourpres, ors, blancs immaculés, onctions et chants … Le nouveau vicaire nous enseignera-t-il la jolie fleur de l’ancolie, celle du « dicentra spectabilis », dite « cœur de Marie ? Saura-t-il, par la création, nous conduire au Créateur ? Ô, Seigneur, donnez-nous des poètes et des prêtres, donnez-nous des poètes qui soient des prêtres, donnez-nous des médiateurs, des intercesseurs, des introducteurs ! … Ô, que le prêtre nous apprenne à voir ! … Mais, pour nos enfants, y aura-t-il encore des prêtres, y aura-t-il encore des poètes ?




 





Dans les travées de la cathédrale, exceptionnellement remplies, se presse une foule de vieillards. Les officiants sont plus vieux encore, quoique nombreux. Nos enfants connaîtront-ils encore les noms des Saints, les noms des fleurs, ou bien inventeront-ils d’autres voies, d’autres chemins ? … Il est temps encore, mais que l’anabase, vite, s’accomplisse ! Que l’on assure la fondation de villes neuves et pures !











De la vieille cité, il te faudra sortir encore. Tu reprendras le chemin que les pluies ont noyé. Tu peineras, tu glisseras, tu chuteras. Un matin, pourtant, le voile se déchirera, le nuage s’ouvrira. Alors, au détour d’un champ, à la sortie d’une forêt, à la crête d’une colline, au sortir d’une pensée surprise, la beauté de toute une chaîne de montagnes encore couronnées de neige se manifestera, remplie de lumière. Elle s’impose à l’évidence. On ne la discute pas ? Ombres et clartés … On admire !

Peut-être bien que tu auras alors trouvé ce que tu cherchais dans ce long voyage ?














Marcheras-tu jusqu’au champ des étoiles ? Qu’y trouverais-tu, autre qu’une très vieille légende ?









«  Eh ! Qu’importe ! … Croire ou douter, c’est exactement la même chose, après tout, n’est-ce pas ? … Seule l’indifférence est impie.





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