Vous qui savez tant de choses …
Nos
vaisseaux ayant descendu le cours des fleuves
Avançaient
dans une plaine immense
Nos
amours nous portaient
Que
nous ne connaissions pas
Désirs
de fruits et de sel
Soifs
Pour
un million d'années
Nos
certitudes immuables
Éclosions
de lueurs
Aux
indes étaient les îles
Des
souffles tièdes nous poussaient
Carènes
de navires invulnérables
Comprenez-vous
bien cela
Vous
qui déchiffrez les portulans ?
La
toile de nos voiles était taillée dans nos rêves
Maîtres
de l'immensité
Ô
douceur !
Ivres
d'images nouvelles
Toute
foi toute confiance !
En
vérité ce furent des millions d'étoiles
Des
comètes en pluie
Des
milliers de soleils et des milliers de lunes
Poissons
étincelants
Myriades
d'oiseaux jaillissant des flots
Tous
plumages toutes couleurs
Dans
nos sillages vibraient des cordes de cristal
Mozart
chantait à l'étambot
Nous
maintenions le cap
Avançant
vers nos fiancées
Lignes
bleues des araucarias au ras des flots
Éblouissements
du corail
Palmes
Sables
et floraisons de l'océan
Porcelaines
diaphanes dans le creux des vagues
Irisation
des verreries
Saveurs
de nos vins !
De
grandes fleurs très étranges flottaient entre deux eaux
Mauves
et laiteuses
Mais
au resserrement des détroits nous cherchions
Des
effluves plus suaves encore
Les
parfums d'autres épices
Souffles
de cannelle
Haleine
de la cardamome
Encens
musc cire et benjoin
Girofle
poivre tamarin
Au
long des plages du santal et du piment
Des
caravanes charriaient du sucre et du gingembre
Des
coupons de damas et de brocarts
Des
paniers pleins de perles ou bien d'écaille
Les
matins allumaient des couleurs de verrières
Et
les soirs déroulaient des tapis somptueux
Sur
l'écran du ciel parfois s'épanouissaient des pavots
Ô
nous en avons vu des crêtes chargées de neige
Des
glaciers et des volcans
Des
dunes jaunes et des terres rouges
Des
anémones et des lys !
Auréoles
d'amarante
Iris
vallées de pivoines
Les
pollens répandus en poudre d'or
Ont
célébré nos passions
Nous
rêvions de papillons
De
coquilles et de nacre
Les
océans roulaient des rubis
Des
diamants et des saphirs
Émeraudes
et pierres de lune
Nous
quittions les îles l'une après l'autre
Leur
laissant les prénoms de nos femmes de nos amours
Caroline
Thérèse Lucie Dominique
Chacune
un lotus posé sur la mer
De
fastueux banquets nous ont été offerts
Chansons
de harpes de violes et de flûtes
Musique
de chalumeaux trompes et tambours
Nous
allions toujours suivant la Croix du Sud
Alpha
du Centaure
Ou le
navire Argo
Qui
nous eût appris que des tempêtes
Allaient
déchirer notre voilure
Abattre
nos vergues briser notre mâture ?
Allez
donc savoir quand et comment
Nous
entrâmes dans cette lagune qui se meurt !
Nous
voici pourrissant
Vapeurs
de fièvres qui rôdent fétides
Fades
odeurs des moisissures
Chairs
humides feuillages gras
Anthuriums
inquiétants balisiers
Improbables
orchidées
Dans
les sargasses de la tourbe et de la vase
Sous
de lourdes frondaisons
Étranges
respirations
Nous
n'apercevons que serpents
Salamandres
sauriens
Animaux
de toutes tailles
Bardés
de cuir ou bien d'écailles
Aux
figures surprenantes
Il
serait bien hasardeux de les décrire ici !
Comprenez-vous
cela
Vous
qui savez tant de choses ?
CHANSON
Vent
frais
Vent
du matin
Dans
le vent, le sommet des grands pins
Joie
du vent
Qui
chante
Allons
dans le grand vent …
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