dimanche 9 septembre 2018

POINTE À PITRE .... GUADELOUPE






GUADELOUPE

                        POINTE À PITRE











           La « pointe à Peter », sans doute, du temps où la

Guadeloupe se partageait entre les grandes plantations :

Les « habitations », comme on disait, et « Peter » devait être

le maître, sur cette pointe qui s’avance dans la baie. Une

gravure ancienne me montre ce paysage : Fumées des

usines à sucre, palmes, collines que l’on appelle des

« mornes ». Un essaim de navires  hérissés de grands

mâts dénudés, voiles abattues. Navires ancrés là dans

 l’attente de leur chargement ou de leur déchargement.

C’était en 1871 et les maisons étaient de bois.


         Mes souvenirs sont plus récents et font d’abord

ressurgir des odeurs : Le  coprah, la mer, la pluie, des

fleurs et des fruits, des fermentations indéfinies ….

Ils font aussi revenir une lumière à nulle autre pareille, près

de la darse, lorsque règne « Midi, émietteur de cymbales »

…. Et le petit Alexis Saint-Léger-Léger prend son bain

dans le jardin où « Madame Lalie » passe le peigne dans

sa tignasse. Le petit Alexis ne reviendra pas mais il a chanté

comme nul autre  la Guadeloupe des planteurs … On ne le

lui pardonnera pas : Je ne sache pas qu’une plaque

affiche son nom à l’angle d’une rue  « Saint-John Perse ».



 

         Ce temps n’est plus et c’est beaucoup mieux ainsi :

Le monument érigé à l’entrée de la ville représente l’esclave

brisant ses chaînes.

         Je me souviens, moi, d’une longue avenue. Elle enjambe

 la « Rivière Salée » à Baie Mahault. La « Rivière Salée », en

fait, c’est un bras de mer étroit : le bras de mer qui sépare

 les deux îles de la Guadeloupe, nées à des époques et

dans des circonstances différentes : La « Grande Terre »,

au Nord et la « Basse Terre » au Sud. La « Basse terre,

bien sûr, est la plus montagneuse, et de très loin ….

L’autre étant un plateau assez sec sur lequel s’étendent

à perte de vue les champs de cannes à sucre.



 
         


         C’est pratique, ce pont sur la « Rivière salée », que l’on

appelle « Le Pont de la gabarre », (allez donc savoir

pourquoi !) … C’est  très pratique, ce pont, car,  lorsqu’il y

a, (cela arrive assez souvent dans le pays), une grève

générale, un mouvement de revendication ….

Une poignée de manifestants suffit pour couper la

circulation automobile et paralyser toute l’activité.



Aujourd’hui, il n’y a pas de manifestation. On entre dans

 la ville après avoir longé les bâtiments de béton du lycée

Bambridge : Pas très beau !  À droite, une tour, de béton

également : C’est la tour Frébault, occupée essentiellement

par des bureaux. On prend la rue principale ; Je crois bien

me souvenir qu’elle s’appelle également la rue Frébault …

Qui était ce Monsieur Frébault ? – Il faudra que je cherche

sur internet, cela en vaut la peine.



 
             

            Hautes maisons, de bois, pour la plupart : On est

dans la ville du dix-neuvième siècle. Balcons, balustres,

auvents, boutiques et magasins sombres : Que peut-on

bien y vendre ? – Aux devantures, bassines de matière

plastique, balais, cintres sur lesquels des vêtements sont

accrochés. Derrière les vitrines étroites et rares, on

devine des sacs et on aperçoit des objets indistincts …

Prenons à gauche : Petite rue assez étroite – Les chalands

font leurs courses à pied, évitant les voitures comme ils le

peuvent. Une petite place : La place de la sous-préfecture,

 assez triste – Les enfants entrent à l’école. La plupart

d’entre eux  sortent des autobus. Poursuivons notre chemin

 : On débouche en pleine lumière – Et Dieu sait s’il y en a,

de la lumière !



                        « Midi, émietteur de cymbales … »










         Les morceaux de cymbales tremblent sur l’eau de la

darse. Il n’est pas midi pourtant … Des traces d’essence, ou

d’huile, donnent des irisations irréelles. Au milieu de

cette gloire flotte le cadavre d’un chat. Deux ou trois

flamboyants étalent leurs majestueux parasols en manière

de manteaux royaux, vermillon moucheté de blanc :

Somptueux ! Et là, le marché couvert, ses odeurs de

mangues, d’ananas, de sapotilles, de pommes-cythère, de

bananes … Que sais-je encore ? – Des tissus pendent aux

piliers, rutilants, de toutes les couleurs … Et les verts plus

ou moins foncés, plus ou moins tendres, des haricots, des

salades, des choux …. Le rouge des tomates ! Les femmes

sont vêtues d’amples robes bigarrées, mouchetées,

zébrées … Certaines s’abritent à l’ombre de parasols, eux

aussi très colorés. Le toit du marché est couvert de tôles,

dont certaines sont peut-être un peu rouillées, mais toute

la ville est couverte de tôles rouillées, à l’exception des

bâtiments récents, en béton gris : Eux, ils ont des

toitures en terrasses. Persiennes, persiennes, persiennes :



                               - « Midi, émietteur de cymbales … »








             Midi, le tintamarre de son soleil  … Les yeux presque

fermés … Et la mer est là, derrière les hangars de bois,

comme un océan de plomb fondu ! … Juste une fente, entre

les paupières !




              Des voitures, des voitures, des voitures …

Des klaxons … Un grand diable traverse la rue en agitant

les bras. Cela sent le rhum et le jus de la canne à sucre,

cela sent la bagasse, le coprah, l’huile … Et l’on sent, en

arrière de tout ça, une vague odeur de poussière, de fibres

 de sacs. Une petit bateau sale, coque en bois peinte en vert,

 derrière le bureau des douanes, embarque du monde

pour la Jamaïque, la Désirade ou bien la Dominique :

« Touk … Touk …Touk » …

         Un grand paquebot blanc est à quai, ses ponts

multiples dominent la ville. Les touristes, vêtements légers,

 montent dans les bus, mais ils semblent déjà écrasés de

chaleur … Un palmier prend la couleur de l’or. De

l’autre côté, des grues chargent et déchargent de

lourds containers. Grondements sourds et le soir, des

immeubles en barres, sortiront des cris, des chants et le

battement du « gros-ka » … Effluves vénéneuses et lourdes …












             -« DÉFENSE DE DÉPOSER DES MAISONS ! »





                Une pancarte au beau milieu d’un terrain vague, où

sont tout de même Installées quatre ou cinq « cases » -

Baraques, caisses de bois, posées de guingois, chacune

sur quatre pierres inégales … Parois peintes de couleurs

agressives : rouge, vert ou jaune … Toits de tôles plus

ou moins disjointes, pansements de fer blanc issus de

boites à biscuits ou de boites de conserves de viandes …


                   Sur la porte de l’une de ces cases, écrite avec un

pinceau rageur, une annonce excédée :

-« Foutez moi la paix. Je ne suis pas la femme des pêcheurs ! »

                    Et  Marie-Rosalie balaie le seuil de sa maison,

tandis que son chien, aplati dans l’ombre, soulève une

paupière.









           Mais comment faire, avec tous ces camions, toutes

ces voitures, tous ces pick-up ? Comment faire, avec toute

cette foule ? – Sortir de là : Il y a mieux à voir que

Pointe à Pitre, en Guadeloupe !





                                   

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