jeudi 5 février 2015

LES PETITS CAILLOUX-(4)




LES PETITS CAILLOUX-(4)




                                                       - ERROMANGO-












































OU TRIBULATIONS

AUTOUR DU MONDE …






« Je serai donc demain le mort et le mystère, Moi qui suis aujourd’hui celui qui va chantant. »

Borges – Les énigmes (L’Autre, le Même.)





ERROMANGO - VANUATU




L’île est bien celle que décrivait Pierre Benoît. Mais comment Pierre Benoît fît-il connaissance avec elle, perdue dans les fins fonds du Pacifique ?



Personnellement, je la rencontrai pour la première fois en 1962. L’avion qui me transportait, un petit bimoteur emportant six ou huit passagers s’est posé sur un terrain qui n’était qu’une déchirure au milieu des arbres.



La piste avait été ouverte à la machette. Elle avait juste la largeur suffisante pour se poser et le bout des ailes frôlait les troncs des cocotiers. Comme la piste était aussi très courte, l’avion bloquait ses freins juste au bord de la très haute falaise.



Quand il décollait, il effleurait les têtes des papayers, puis chutait vers la mer.

Le pilote faisait ronfler les moteurs et l’appareil reprenait doucement de l’altitude :
Impressionnant !











                                PAPAYER



L’île est luxuriante, foisonnante, étouffante de splendeurs végétales. C’est la splendeur d’une serre. Air rare, saturé de vapeur, chaud comme l’haleine d’une bête et sentant le suint. Depuis quinze jours, la pluie n’a pas cessé, drue comme un déluge. Les hommes courbent le dos, comme si des graviers leur tombaient dessus, par poignées, par volées. Les larges feuilles des tarots ont été lacérées.



Depuis une heure, il ne pleut plus. La forêt s’égoutte, et c’est encore comme s’il pleuvait. La forêt que l’on sent, que l’on devine, proche, vivante, enveloppante, mouvante. Mais la forêt qu’à dire le vrai, on ne voit même pas ! On y est plongé, et elle est si dense ! Le sentier que l’on suit n’a que la largeur du pied, encore faut-il veiller à ses contorsions, à ses détours, aux obstacles inattendus, aux arbres renversés, aux torrents nés des dernières averses, qui roulent des eaux rouges et noires. Les branches forment voûtes et ce n’est que rarement qu’elles laissent une fente étroite à travers laquelle on aperçoit les lourds nuages mouvants.








                         BANIAN



Le sol doit être noir, noir de cendres volcaniques, ou bien rouge d’argiles détritiques. On le devine, mais on ne le voit pas : l’herbe le recouvre : Le pourpier, la tétragone, les impatiens ... Toutes plantes buveuses d’eau dont le climat favorise la pousse. De temps à autre, assez rarement somme toute, un buisson éclate de feuilles rouges et de fleurs rouges aussi : hibiscus, croton. On enjambe les racines et les contreforts d’arbres gigantesques, des “ châtaigniers” dont les appendices et tentacules se tortillent en nœuds de serpents. Parfois on distingue la branche longue, lourde et horizontale d’un figuier banian. Cet arbre est aussi appelé le figuier étrangleur.
Le banian ! Il est capable de phagocyter, d’avaler carrément un autre arbre, son voisin, une maison. C’est lui qui “avale”, au Cambodge, les palais et les temples d’Angkor ! Racines aériennes qui forme une autre forêt, dont on dit qu’elle fait le lien, sorte de ligne téléphonique, entre le ciel et la terre. On dit que ces racines permettent de communiquer avec les morts, établissant la relation entre le ciel et l’enfer. Des pigeons verts y roucoulent, se gorgeant de baies. Un loriquet, vert lui aussi, mais on ne le voit que rarement tant il passe vite ! Il lance un cri aigu. C’est le royaume du vert. Les petites tourterelles, nombreuses, sont vertes elles aussi, avec une tache de rubis sur le dessus de la tête. À quelques exceptions près, on est incapable de percevoir et d’identifier les arbres qui se fondent dans la masse, elle-même drapée du haut en bas dans une épaisse tapisserie de lianes et de feuillages épiphytes ou parasites. Une masse végétale, comme une mer !









                           COCOTIER



VANUATU



Il est des îles
Faites de toutes les îles
Promises ou reprises
Caressées rêvées
Ravagées violées
Celles qu'on a voulu
Celles qu'on a eu
Lagons versatiles
Langues d'huile et de myrte
Aux oursins bleus
Iles femmes
Prêtes à s'ouvrir
Il est des îles
De laves et de cendres
Au souffle tranquille
Des volcans respirant
Monstrueusement
Iles accroupies
Dures et splendides
Et le front baissé
Leur ciel se referme
Sur l'ineffable vie
D'improbables secrets
Îles solitaires
Ne m'attendant guère







                               À LIRE !

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