mercredi 18 février 2015

NAUFRAGE DU TIGER (6)



LE NAUFRAGE DU TIGER




CHAPITRE 6














_" Monsieur Blore avait mesuré la hauteur du soleil. Elle donnait une latitude de dix huit degrés sud. Notre conclusion, c'était que, comme nous l'avions imaginé, nous nous trouvions sur l'île inhabitée de Juan-de-Nova. Monsieur Spurs nous lut à haute voix la description que font de cette île les instructions maritimes de Horsburg : Il semblait bien qu'elle confirmait notre hypothèse ...

_" Je m'étais demandé pourquoi le timonier n'avait pas donné l'alerte, au moment où nous nous étions échoués, le douze au matin. J'interrogeai l'homme à ce sujet. Il me raconta qu'il avait bien entendu le rugissement des brisants mais qu' il avait pensé qu'il s'agissait d'un phénomène surnaturel à mettre en relation avec la mort du Capitaine Searight ... C'est pourquoi il n'avait rien dit ! Et c'est pourquoi nous nous trouvons maintenant sur la plage déserte d'une île déserte dont nous ne sommes même pas tout à fait certains de l'identité, ni de la position ..

















      




         "Les vivres ne manquaient pas ... Le premier jour, le cuisinier avait fait un énorme ragoût, avec toutes les dindes et toutes les autres volailles qui s'étaient noyées. Il avait ajouté à cela quantité de jambon et de biscuits.

_"Nous avions deux cents jambons, une douzaine de bons et gros fromages, plusieurs barils de biscuits, de l'alcool, du vin en tonneaux et en bouteilles, de la bière, un baril de farine, un autre d'orge, un troisième contenait de l'avoine. Nous avions un peu de riz et de sucre, des épices, des pickles, des sauces, de la moutarde, plusieurs moutons, un porc, une douzaine de poules... Nous avions également des nappes, des couteaux et des fourchettes, des assiettes, des plats, des tasses, des saucières ... Et une quantité de livres religieux, éducatifs ou pratiques, des plumes, de l'encre et du papier, quelques vêtements ... Notre existence était assurée et nous pouvions, si nécessaire, passer plusieurs mois sur cette île.




































_" Nous avons commencé par en faire le tour. Il fallait pour cela environ dix heures, à pied. Son périmètre devait donc mesurer environ quinze miles. Sur les plages, on rencontrait une assez grande quantité d'épaves : grands arbres arrachés, les racines à l'air, provenant sans doute de Madagascar et amenés là par les courants marins, débris de bateaux, dont une ancre de bonnes dimensions et le mât d'un grand navire. Nous rencontrâmes même une grande pirogue abandonnée, des huttes en ruine, des traces de foyers contenant encore du charbon de bois ... Il n'était pas interdit d'envisager pour le futur un éventuel débarquement d'indigènes malgaches ... Nous avons aussi, pendant la durée de notre séjour sur l'île, capturé plusieurs tortues de mer, qui vinrent agrémenter notre ordinaire. Des filets, confectionnés par les hommes d'équipage, permirent aussi de pêcher quelques poissons, dont certains de bonne taille.

_" Le temps passait, assez monotone. Les matelots, plusieurs fois, se rendirent jusqu'à l'épave de notre navire, laquelle n'était pas encore disloquée. Ils en ramenèrent surtout, hélas, des bouteilles d'alcool avec lequel ils s'enivrèrent plusieurs fois, nous causant de grandes frayeurs par leurs colères et leurs rixes.





















_" Bien que relisant souvent les Instructions Nautiques, nous n'étions pas très sûrs de l'identité de notre île et, partant, de sa situation exacte : Étions-nous sur Juan-de-Nova ou bien sur Astove ? De l'avis général, nous devions nous trouver sur Juan-de-Nova ... Nous étions quelques-uns à ne pas en être absolument convaincus.

_" Dès les premiers jours, le charpentier, aidé par quelques hommes, avait entrepris de modifier le grand canot : Il voulait l'allonger, portant ainsi sa longueur à trente pieds hors-tout, alors qu'elle n'était initialement que de vingt trois pieds. Il utilisait pour cela des pièces de bois récupérées sur l'épave de notre pauvre "Tiger". Son équipe travaillait d'arrache-pied. Nous avions décidé que Monsieur Spurs embarquerait, dès que possible, avec quelques hommes. Ils essaieraient d'atteindre les Seychelles. L'alerte donnée, on reviendrait nous porter secours.

_" Une nouvelle expédition jusqu'à l'épave nous a permis de ramener trois barils de viande de boeuf et un de viande de porc. Ces salaisons seront réservées à ceux qui, comme nous, doivent rester sur l'île. Nous avons préparé un petit nombre de messages, écrits sur du papier à dessin :

_" Le "Tiger", de Liverpool, s'est échoué sur Juan-de-Nova ou l'île Farquhar, Latitude dix degrés sud. L'équipage et les passagers se trouvent sur la côte est. Le mouillage est au nord."

_" Ayant rédigé ces messages, je les signai de mon nom : " W. Stirling, Capitaine de l'Armée Indigène de Bombay." Tous ces messages furent placés dans des bouteilles, que nous avons cachetées. Elles devaient être emportées par nos amis et lancées à la mer l'une après l'autre ... Peut-être quelqu'un les trouverait-il ? Le grand canot, dans sa nouvelle structure, reçut un nouveau nom de baptême : Nous lui donnâmes celui de "Hope", l'"Espoir" ... Quel plus beau nom aurions-nous pu lui donner ?







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