Cette histoire se déroule dans
l’île de Malikolo. Vous pouvez aussi l’appeler Malekula, c’est selon votre bon
plaisir. L’archipel s’appelle maintenant le Vanuatu, depuis qu’il est
indépendant. À l’époque, il s’appelait l’archipel des Nouvelles-Hébrides et il
était placé sous le gouvernement conjoint de la Grande Bretagne et de la
France. On appelait ça un condominium. De cette formule de gouvernement il y
aurait d’ailleurs beaucoup à dire ... et beaucoup à rire, parfois à pleurer;
J’en donnerai juste quelques
aperçus car ce n’est point là mon propos d’aujourd’hui.
On peut constater tout d’abord que,
les Anglais roulant à gauche, et les Français à droite, pouvaient naître
certains problèmes. J’ai connu de vieux planteurs qui n’auraient cédé pour rien
au monde lorsqu’ils se trouvaient face à un véhicule venant sur le même côté de
la route, mais en sens inverse. On peut imaginer le genre d’apostrophes qu’ils
pouvaient s’adresser en ces occasions !
Pour aller vite, on peut raconter
aussi l’histoire de la fourrière de Port-Vila, la capitale.
Il faut pour cela noter qu’il n’y
avait pas aux Nouvelles-Hébrides deux, mais bel et bien trois administrations
puisque l’assemblée du Condominium avait aussi son mot à dire : elle réunissait
des représentants Anglais, des représentants français et des autochtones.
L’assemblée condominiale, un jour,
constatant qu’il y avait de plus en plus de chiens et de chats errants à
Port-Vila, décida de la construction d’une fourrière. La fourrière construite
... Qui allait payer le fonctionnement et l’entretien des animaux ?
Après moult palabres, exposé des
exigences et des concessions possibles, on décida ... Que les chiens seraient
anglais et les chats français ! Et cela fonctionna ainsi !
Il y aurait beaucoup de choses à
raconter encore. je vous laisse imaginer, mais peut-être reviendrai-je un jour,
sur les “joyeusetés du condominium” !
Pour le moment, c’est de la visite
d’un Ministre qu’il s’agit. Une visite à Malikolo. Il s’agit, si mes souvenirs
sont bons de Monsieur Bourgès-Maunoury, Ministre de la France d’Outre-mer, sous
la Présidence de Charles de Gaulle. C’était dans les années soixante.
Je n’étais pas à Malikolo, mais je
résidais dans une île du même archipel et l’un de mes amis résidait, lui, en tant
que médecin, dans l’île en question;
Il faut dire quelques mots à propos
de ces îles. Îles hautes, volcaniques, aux plages noires, aux terres sombres,
aux frondaisons impressionnantes en épaisseur et en hauteur : La forêt
primitive dans toute son acception, impénétrable et foisonnante. Il pleut
souvent et il fait souvent chaud. Philodendrons, lianes, de rares oiseaux du
genre pigeons ou tourterelles et des cochons sauvages.
Quelques rares européens, dans des
boutiques où l’on vend de tout. Les autochtones sont des Mélanésiens vivant
leurs coutumes et se réunissant le soir ( Seulement les hommes) sur la place du
village, (le nakamal) pour boire le kava ( drogue douce ayant des effets
oniriques ). Autour du nakamal, des cases de bambou à toit de roseaux.
À Malikolo vivent deux peuples :
Sur les rivages, les “Small Nambas” et dans l’intérieur de l’île, les “Big
Nambas”. ( je schématise, que l’on me pardonne).
Savez-vous ce que l’on appelle le
“namba” ? Eh bien voilà : Les gens des deux peuples vivent nus. Les mâles des
deux peuples cachent leur sexe dans un étui attaché autour des reins par des
brins de raphia ou de quelque chose qui y ressemble, afin, sans doute, de
figurer une érection permanente.
Le reste de la description de cet
attribut, on peut le déduire des noms qu’on lui donne :
Les Big Nambas portent un étui
pénien qui est beaucoup plus long que celui des Small Nambas !
Orgueil ? Machisme ? Prétention ?
J’ai vu des photos, les étuis péniens des Big Nambas sont vraiment impressionnants
et peuvent laisser rêveur !
Les Big Nambas sont chez eux. Ils
acceptent les gouvernements qui les dominent, mais c’est à leurs conditions :
-” Tu vois, dira le Chef des Big
Nambas au Ministre qui leur rend visite. Tu nous promets la construction d’un
hôpital. C’est bien, mais tu sais, quand on est dans la pirogue, si on pagaie
d’un seul côté, la pirogue ne va pas droit, alors, nous, on pagaie des deux
côtés.” Il sous-entendait par là qu’il sollicitait l’aide de la France, mais
qu’il ne s’interdisait pas pour autant de solliciter aussi celle des
Britanniques. Fierté et sagesse et la pirogue ira bien droit !
Pour aller chez les Big Nambas, il
faut demander l’autorisation plusieurs jours à l’avance et respecter les
coutumes : On doit envoyer un émissaire chargé de présents : Un coupon de
tissu, un paquet de tabac, un billet de banque ...
Les Big Nambas voulaient bien
recevoir le Ministre français. Celui- ci allait décorer le Chef des Big Nambas.
De quelle décoration s’agissait-il ? _ Il ne m’en souvient guère et, au fond,
il importe assez peu. Une décoration avec une médaille et un ruban de couleur,
comme toutes les décorations qui s’accrochent à la poitrine des récipiendaires
...
Vous avez parlé de la poitrine ?
Eh bien justement ... Parlons-en !
Monsieur Bourgès-Maunoury, Ministre de la République Française et du Général
Charles de Gaulle s’apprêtait à remettre la décoration piquée sur un coussin
...
Mais allez-donc épingler une
décoration sur la poitrine d’un homme nu des pieds à la tête, portant pour tout
vêtement un orgueilleux étui pénien ! Perpléxité ... O ! Solennité de l’instant
!
Je ne sais qui trouva la solution :
On passa un collier de ficelle autour du cou de ce Chef et le Ministre accrocha
la médaille à la ficelle.
Ce fut après, que le Ministre
prononça le plus sérieusement du monde un discours dans lequel il promettait de
faire constrire un hôpital. Et ce fut après que le Chef des Big Nambas fit un
exposé sur la meilleure façon de pagayer lorsqu’on est dans une pirogue.
Quelques années plus tard, la
pirogue devait aller seule, l’archipel étant devenu indépendant sous le nom du
Vanuatu.
Le Vanuatu est maintenant une
destination touristique. La longueur des étuis péniens est-elle pour quelque
chose dans son succès auprès des touristes ? Je suis certain que l’on pourrait
répondre par l’affirmative !
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