VERS LES PYRÉNÉES
" Au bout de la longue plaine, un pont
suspendu franchit la Garonne entre Espalion et le "port" d'Auvillar :
Vieilles maisons au bord du fleuve et, sur les anciens quais, Ste.
Catherine-du-Port, XIVeme siècle, chapelle des mariniers.
Au-dessus, le bourg d'Auvillar, au site
exceptionnel : Perché sur une terrasse au-dessus de la Garonne, il offre
panorama et table d'orientation. Il y a une rue Saint Jacques, une rue de la
Sauvetat. On arrive par une ruelle, bordée de vieilles maisons du XVeme au
XVIIIeme, dont celle des Consuls et de la chapelle, désaffectée, des Carmes, à
la place à couvert où trône une halle circulaire sur colonnes, à plan très
ancien, véritable leçon d'architecture et d'urbanisme ! Après le passage voûté
sous la Tour de l'Horloge, on passe sous l'Église St. Pierre. Longue de 43
mètres, elle conserve une partie romane, aux pierres claires et sombres
alternées, et une voûte gothique à viernes et à tiercerons. On visite son Trésor
et aussi le musée du Vieil Auvillar ( faïences du XVIIeme siècle, fabrication
de plumes d'oie pour l'écriture, ex-votos de mariniers ). "
... Marcher sur le Chemin de
Compostelle, entre Moissac et St. Antoine. Marcher en tournant le dos aux deux
immenses cheminées de la centrale nucléaire de Golfech, nettes, belles, mais
quelque peu inquiétantes, quoi qu'on en ait. Elles nous suivent depuis trois
jours, ces cheminées en forme de tours : On les apercevait déjà des hauteurs de
Montlauzin, bien avant Lauzerte. Marcher le long de la Garonne et du canal qui
en double le cours. On a en main le guide de Louis Laborde-Baleine et Rob Day.
On marche depuis Le-Puy-en-Velay, depuis des jours et des jours. On traverse la
Lomagne, encore appelée "Gascogne Bossue", et ce nom suffit à la
dépeindre : Longues lignes droites franchissant de raides collines , découverte
de nouveaux paysages après chaque tournant. On entre dans le pays gersois. Le
temps est beau. C'est le printemps. La verdure a été rafraîchie, lavée par les
averses de la veille. Le cheminement est incontestablement chargé de
spiritualité. Les pas sont légers. Et puis, après une longue montée ...
-"Comment as-tu pu passer sans les voir ?"
... Les Pyrénées sont là, pour la première fois dévoilées, Plein sud, et sur
toute la largeur de l'horizon ...
_ "Oh ! Compagnon ! Tu n'as pas vu ?" ...
Sans doute marchait-il en regardant la terre du chemin, que les pluies récentes
et les sabots des bovins avaient transformé en cloaque traversé par de
profondes ornières.
_"Ce sont elles ! Là !" ... Oui, ce
sont bien elles, et les sommets sont tous enneigés. Qui a prononcé la célèbre
phrase : "Il n'y a plus de Pyrénées ?" ... Elles sont là et elles forment
bien une chaîne, une barrière dentelée qu'on a l'impression de découvrir tout
entière, de Banyuls à Hendaye, cachant l'Espagne dont elles nous séparent ...
Elles sont là ! ... Remontent en mémoire quelques souvenirs scolaires, tout en
vrac, insoucieux des localisations véritables : Le Pic d'Aneto, le mont
Vignemale, le Pic d'Anie, le Pic du Midi d'Ossau, le Pic du Midi de Bigorre, le
col du Tourmalet, le col de Puymorens, le col du Perthus, ... On sait que les
chemins traversent par le Somport, par le Pourtalet, par Roncevaux ...
Roncevaux ! Roland et les chevaliers de Charlemagne y sonnent du cor, toujours
... Les grognards de Napoléon y traînent leurs canons, y poussent leurs chevaux
! La chaîne des Pyrénées, c'est superbe : on pense encore au cirque de
Gavarnie, au Roi Henri IV, aux miracles de Lourdes ... On pense surtout au
miracle de jour en jour renouvelé de cette foi qui habite les pèlerins de
Compostelle depuis plus de mille ans qu'ils usent leurs semelles sur ces
chemins et promènent leurs coquilles, de ville en ville, de chapelle en
chapelle, d'hospice en hospice, passant les ponts, enjambant les fleuves, les
ruisseaux et les gaves ... Curieux, ce n'est pas aux sports d'hiver que l'on
pense, et pourtant, la neige est là. Elle brille de tous ses feux halogènes, de
toutes ses pentes, de toutes ses facettes, jouant avec les ombres des vallées.
D'un seul coup, une beauté absolue entièrement dévoilée ... C'est à vous couper
le souffle, et cela vous le coupe en effet.
Mon compagnon est revenu sur ses pas.
Il a saisi sa caméra, il tourne sur lui-même pour prendre des vues
panoramiques, il joue avec le zoom pour faire des plans rapprochés, il parle à
son appareil, essayant avec ses pauvres mots, à l'intention de ceux qui ne viendront
jamais ici, de traduire l'intraduisible, de dire l'indicible. Exercice
d'admiration longuement prolongé avec force exclamations, force périphrases.
Nous reverrons ce spectacle, à
St. Antoine, à Nogaro, à Aire-sur-l'Adour ... Du balcon d'Arthez-de-Béarn
surtout, mais aujourd'hui, depuis Auvillar, c'est la première fois, et c'est
une merveille ! ... Combien de centaines de kilomètres encore, pour aller à
Santiago ?
_ "Il y a près de onze
cents kilomètres encore, je crois bien, pour aller jusque là ! "
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