mercredi 31 octobre 2012

EN PROVENCE ...




Là où c'est splendide, c'est quand tu prends ton vélo pour descendre de Lorgues jusqu'au Cannet des Maures ... Une ivresse beaucoup plus intense qu'à la montée, d'autant que tu as tout le temps devant toi. Alors, tu choisis l'autre route : Pas celle qui passe par Les Arcs et Vidauban, celle qui dégringole par le Thoronet. 


Je l'ai également prise pour la montée, à condition qu'il n'y ait pas trop de vent, mais à la descente ... Une gloire !


                                  
Chaque fois, je m'arrête au Thoronet. L'abbaye est vide, mais elle est en parfait état. Je pose mon vélo contre un muret puis ... J'écoute. J'écoute les cigales et les oiseaux. Parfois j'entends glisser dans les herbes une couleuvre à collier. Dans le cloître, j'écoute mon coeur, mon sang, j'écoute mon âme : un cloître, c'est bien fait pour ça ?


                                    
Deux ou trois roses, redevenues sauvages retournées à l'églantine ... Fraîcheur des murs épais, sonorité sous les voûtes, appel d'un faucon tiercelet ...


                                 
Couchées à même les dalles, au-milieu d'une salle nue, gisent les cariatides de Puget. On les a déposées là pour les mettre à l'abri de la guerre. Elles attendent la reconstruction de Toulon. 

"Puget, Pierre _ Sculpteur français, né à Marseille (1620-1694)", dit le Petit Larousse.  "Il est l'auteur des atlantes de l'hôtel de ville de Toulon."


                                  

Les atlantes ont été sculptés pour porter le poids d'un balcon et pour porter tout le poids du monde. Je sais que c'est là que j'ai pris le goût d'un certain art puissant. Mais ils étaient désolants, les atlantes, délaissés au Thoronet, seuls occupants, et couchés, 
d'une abbaye déserte ... Pas même un  gardien. Je les ai revus depuis : Ils avaient repris leur place : À nouveau ils portent le balcon du bâtiment qui est devenu le musée naval. Je les ai revus comme de vieilles connaissances. Ils ont retrouvé signification et identité ... Au Thoronet : Deux géants allongés ... Ils étaient retournés à la pierre ! Mais, n'eussent-ils pas été là que j'eus quand même aimé le cloître ... J'y avais des instants mystiques et purs ... Parfois il me venait des pulsions de vocation : Qui n'en eût jamais ?


                                   
... Après Le Thoronet, tu reprends la descente : Elle est rapide ... Elle tourne et vire. 

Te souviens-tu de ce jour ? - Une perdrix piétait sur les cailloux du bas-côté avec tous ses pouillards, gros comme des bouchons de champagne ... Marcel Pagnol n'avait pas encore fait connaître le nom des bartavelles ... 
                                  
                                  

Le temps de jeter le vélo dans le fossé, d'escalader le talus ... Les petits couraient dans tous les sens pendant que la perdrix faisait front. J'ai pris deux poussins ... Bonheurs pervers, sans doute ... Mais bonheur ! ... Le coeur plus gros encore, le sang plus vif !

J'avais dix-huit ans !


                            
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